(TORONTO – 11 juin 2013) L’Ombudsman de l’Ontario, André Marin, a demandé aujourd’hui au ministère de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels de briser l’omniprésente « loi du silence », grâce à laquelle certains gardiens d’établissements correctionnels de la province recourent à une force excessive contre les détenus et conspirent pour camoufler leurs actes.
Dans La loi du silence, son dernier rapport d’enquête, M. Marin raconte en détail les histoires troublantes de certains employés correctionnels qui ont commis des « actes de violence éhontée » sur des détenus, ont essayé de détruire et de falsifier les preuves, et ont intimidé leurs collègues qui tentaient de les dénoncer. Il fait 45 recommandations au gouvernement pour mettre fin à cette « culture dysfonctionnelle » et pour garantir que de tels incidents font l’objet d’enquêtes et de sanctions disciplinaires adéquates. Le Ministère s’est engagé à mettre en œuvre les recommandations de l’Ombudsman.
« Il est important de se souvenir que, quelles que soient les raisons de leur incarcération, les détenus sont des êtres humains qui méritent le respect, la dignité et un traitement humain », dit M. Marin dans son rapport. « Le Ministère doit concentrer ses efforts sur les pressions pernicieuses qui s’exercent entre collègues et qui continuent d’influer sur les attitudes et les actes de certains agents correctionnels. » Il doit aussi intervenir avec fermeté pour « éradiquer la loi du silence, qui menace la sécurité des détenus tout comme celle des membres du personnel correctionnel ».
Le rapport de l’Ombudsman souligne que bien souvent les établissements correctionnels sont surpeuplés, manquent de personnel, fonctionnent dans un climat de grande tension, et il précise que de nombreux agents correctionnels font bien leur travail dans des conditions difficiles. En revanche, il révèle des problèmes systémiques au sein même du processus ministériel, qui ont permis à la « loi du silence » de dégénérer.
« Les membres du personnel qui brisent cette loi du silence deviennent victimes à leur tour », souligne M. Marin. « Ils sont appelés "mouchards", ostracisés, traités comme des parias, harcelés aussi bien ouvertement que subrepticement, menacés, et leur sécurité personnelle est remise en cause. »
L’enquête, menée par l’Équipe d’intervention spéciale de l’Ombudsman, a été ouverte en raison d’une tendance troublante décelée dans les plaintes pour la première fois en 2010 par le Bureau de l’Ombudsman, face à laquelle le Ministère a tout d’abord mis beaucoup de temps pour réagir, dit M. Marin. Depuis le lancement de l’enquête officielle de l’Ombudsman en août 2011, le Ministère a renforcé ses politiques pour améliorer ses pratiques de recrutement et de formation, et pour garantir la tenue d’enquêtes plus rigoureuses sur les allégations de recours à la force. Mais beaucoup reste encore à faire, déclare M. Marin.
De janvier 2010 à janvier 2013, le Ministère a confirmé qu’il y avait eu un recours à une force excessive dans 26 des 55 cas sur lesquels il avait enquêté. Quelque 108 membres du personnel ont fait l’objet de sanctions disciplinaires; 31 d’entre eux ont été licenciés – et parmi ceux-ci, quatre ont été accusés au criminel et un a été reconnu coupable.
Les enquêteurs de l’Ombudsman ont mené plus de 180 entrevues avec des agents correctionnels, leurs représentants syndicaux et leurs chefs, des dénonciateurs, des détenus et des responsables ministériels de tous niveaux. Ils ont aussi visité des établissements correctionnels à travers la province et ont examiné des milliers de documents, de photos et de vidéos sur des incidents de recours à la force.
Le rapport de 148 pages présente les histoires de neuf détenus victimes d’un recours à la force, dont le dossier n’avait pas été adéquatement suivi, et celle d’un agent correctionnel qui avait payé cher pour avoir signalé une agression commise par un collègue.
Les 45 recommandations de M. Marin préconisent au Ministère de faire savoir clairement que la loi du silence ne sera pas tolérée et que ceux qui la suivent s’exposent à des sanctions disciplinaires et à un congédiement. Ses recommandations incitent aussi le Ministère à :
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réduire les occasions qu’ont les membres du personnel de conspirer pour camoufler les incidents de recours illégal à la force, manipuler les preuves et intimider les témoins;
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renforcer l’intégrité des enquêtes, en restreignant l’accès aux preuves et en interdisant le partage de l’information;
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améliorer la vidéosurveillance, ainsi que l’archivage des preuves vidéo, dans les établissements correctionnels;
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clarifier quelles techniques défensives sont autorisées pour le personnel correctionnel, et veiller à ce que les employés soient dûment formés sur la désescalade des conflits et la gestion des détenus ayant des maladies mentales et des besoins spéciaux.
L’Ombudsman souligne aussi que certains agents correctionnels ont ouvertement critiqué son enquête ainsi que la réponse jusqu’alors apportée par le Ministère, à la fois lors d’entrevues confidentielles et dans les médias sociaux. Certains de leurs commentaires sur Twitter sont inclus à ce rapport, déplorant « le climat de méfiance et d’animosité » dans le système, ainsi que « l’incompétence [des dirigeants] », et déclarant : « Surpeuplement, etc. = violence ».
Depuis la nomination de M. Marin en 2005, l’EISO a mené plus de 30 enquêtes sur de vastes problèmes systémiques qui touchent des millions d’Ontariens. Le gouvernement a mis en œuvre presque toutes ses recommandations présentées à la suite de telles enquêtes, ce qui a mené entre autres à une amélioration du dépistage des maladies chez les nouveau-nés, à un renforcement de la sécurité du système de loteries et à une refonte du système d’évaluation foncière.
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