Avis public

Avis public

août 21, 2017

21 août 2017

Enquête sur une plainte à propos de l’Elliot Lake Residential Development Commission.

Enquête sur une plainte à propos de l’Elliot Lake Residential Development Commission.

« Avis public »

Paul Dubé
Ombudsman de lOntario

août 2017


Résumé analytique

             Après la fermeture de la dernière mine d’uranium à Elliot Lake en 1996, la ville a cherché des moyens de promouvoir le développement économique. Elle a fait appel à l’aide de la province. En 2001, l’Elliot Lake Act, 2001 a été adoptée, créant l’Elliot Lake Residential Development Commission. En tant qu’agent de la ville, cette Commission gère le développement de terrains acquis auprès de la province, à des fins résidentielles.

2              En vertu de la Loi sur les municipalités de l’Ontario, les conseils municipaux, les conseils locaux et leurs comités doivent aviser le public de leurs réunions, qu'ils doivent tenir en public, sous réserve de strictes exceptions. Le devoir qu’ont les organismes municipaux de tenir leurs réunions en public permet aux citoyens d'assister au déroulement du processus démocratique. De plus, il renforce les principes de transparence, d’accessibilité et de responsabilisation au palier local. Depuis janvier 2008, mon Bureau est en droit d’enquêter sur les plaintes concernant les violations des règles des réunions publiques, dans les municipalités qui n'ont pas désigné leur propre enquêteur.

             Mon Bureau est l’enquêteur chargé des réunions à huis clos pour la Ville d’Elliot Lake, et il a publié plusieurs rapports sur des plaintes à propos de réunions à huis clos dans cette Ville. Cependant, la Residential Development Commission n’est pas un comité, ni un conseil local, assujetti aux exigences des réunions publiques de la Loi sur les municipalités. Par conséquent, nous n’avons pas pu effectuer d'enquête sur une réunion à huis clos dans ce cas.

4              En revanche, la Commission est expressément tenue de mener ses réunions en public en vertu de l’article 4 de l’Elliot Lake Act. Elle peut uniquement tenir une réunion à huis clos si elle « est d’avis que des questions financières ou personnelles intimes risquent d’être divulguées lors d’une réunion, et si la désirabilité de protéger contre les conséquences de leur divulgation publique l’emporte sur la désirabilité de tenir la réunion en public » [traduction]. Le Règlement de la Commission confirme que les réunions doivent se tenir en public, mais il stipule uniquement que l’avis des réunions doit être communiqué aux administrateurs de la Commission.

5              Le pouvoir de mon Bureau dans le secteur municipal a été élargi en janvier 2016 pour s’étendre aux plaintes générales sur l’administration municipale. Nous avons donc été en mesure d'examiner la plainte reçue en décembre 2016 sur l’absence d’avis public des réunions de la Commission, non pas à titre d’enquêteur chargé des réunions à huis clos, mais dans le cadre de notre nouveau mandat général. La suggestion a été faite que les réunions de la Commission ne pouvaient pas être considérées comme des réunions publiques si le public n'en était pas informé. Comme nous le faisons pour la plupart des plaintes générales que nous recevons à propos d’organismes municipaux, nous avons tout d’abord tenté de régler le problème par des discussions informelles avec la Commission. Mais celle-ci a maintenu son opinion qu’elle n’avait pas à donner d’avis au public, et que ses réunions étaient ouvertes à quiconque voulait y assister.

6              Vu l’importance de garantir l’accès du public aux réunions qui doivent lui être ouvertes, j’ai décidé d'entamer une enquête officielle sur la question. D’après cette enquête, j’ai conclu que l'absence d’avis au public pour les réunions de la Commission est déraisonnable et erronée. Bien que l’Elliot Lake Act n’exige pas expressément que la  Commission avise le public de ses réunions, le fait de ne pas l'avertir d'une réunion va à l’encontre de l’objectif de l’exigence des réunions publiques énoncée dans cette Loi.

             J’ai recommandé que la Commission modifie son Règlement pour qu’il stipule explicitement que la Commission devra désormais avertir le public de ses réunions. J’espère que les résidents d’Elliot Lake auront ainsi une possibilité réaliste d’assister à une réunion de la Commission s'ils le souhaitent.

 

Processus d’enquête

             À la suite des modifications de loi entrées en vigueur en janvier 2016, mon Bureau est en droit d’enquêter sur les plaintes à propos de l’administration des entités municipales, et notamment des sociétés contrôlées par une municipalité, comme l’Elliot Lake Residential Development Commission. En décembre 2016, nous avons reçu une plainte alléguant que la Commission tenait ses réunions à huis clos, en violation de l’Elliot Lake Act, 2001 car elle ne communiquait pas d’avis au public.

9              Mon Bureau reçoit plus de 20 000 plaintes chaque année, dont la plupart sont réglées promptement grâce à des techniques alternatives de règlement des conflits. Comme nous avons l'habitude de chercher à régler les plaintes rapidement et officieusement, dans toute la mesure du possible, nous avons tout d’abord communiqué avec la Commission pour tenter d’arriver à une solution. Mais la Commission s’est montrée réticente à changer ses méthodes ou à appliquer nos suggestions en vue d'améliorer l'accès à ses réunions.

10           Le 21 mars 2017, mon Bureau a avisé la Commission que nous enquêterions officiellement sur cette plainte.

11           Notre enquête a été confiée à deux avocates de notre Bureau qui détiennent une expérience en matière de réunions publiques et de questions municipales. Lors de notre examen, nous avons parlé à la secrétaire archiviste et à l'ancien président de la Commission[1], et nous avons obtenu et examiné la documentation pertinente.

12           La Commission a coopéré à notre enquête.

 

L’Elliot Lake Residential Development Commission

13           Après 1996, année qui a marqué la fin de l’industrie minière à Elliot Lake, la ville a dépendu de l’assiette fiscale sur les résidences/les fermes et les commerces comme source de revenus. Elle a demandé au gouvernement provincial de légiférer pour lui permettre d’aménager ses zones en bord de lac et d’autres terrains, à des fins résidentielles, et d’utiliser les fonds pour le développement économique de la ville. L’Elliot Lake Act, 2001 a résulté de cette requête.

14           L’Elliot Lake Residential Development Commission est une société sans capital-actions créée en vertu de l’article 3(1) de l’Elliot Lake Act. La Commission est composée de deux membres du Conseil et de cinq membres du public, tous nommés par le Conseil municipal. Les membres de la Commission servent de Conseil d’administration.

15           Le mandat de la Commission est de gérer, en tant qu’agent de la ville, l’aménagement de terrains acquis auprès de la province, à des fins résidentielles. Le Conseil peut adopter des règlements afin de déléguer certains pouvoirs à la Commission, pour l’achat, la vente et l’aménagement de terrains.

16           Le Règlement municipal 03-51 délègue à la Commission le pouvoir de prendre certaines mesures pour aménager des terrains, et notamment de faire des travaux d’arpentage, de construire des docks et de préparer des demandes en vertu de la Loi sur l’aménagement du territoire et de la Loi sur les évaluations environnementales. Après une période soutenue d’activités de développement qui a suivi sa création (Phase 1), la Commission est restée relativement inactive alors qu’elle attend les approbations requises pour aménager et vendre de nouvelles terres (Phase 2). Actuellement, la Commission s’efforce activement de commercialiser et de vendre environ 10 propriétés au bord de l’eau. De plus, elle procède aux essais environnementaux et à la planification de l’aménagement nécessaires pour vendre plus de propriétés.

17           Conformément à l’article 4 of de l’Elliot Lake Act, les réunions de la Commission doivent se tenir en public, sauf si elle « est d’avis que des questions financières ou personnelles intimes risquent d’être divulguées lors d’une réunion, et si la désirabilité de protéger contre les conséquences de leur divulgation publique l’emporte sur la désirabilité de tenir la réunion en public».

18           En 2002, la Commission a adopté le Règlement 1 (« A By-law relating generally to the conduct of the affairs of the Elliot Lake Residential Development Commission »). Ce Règlement stipule que la Commission doit tenir des réunions au moins une fois par mois et que ces réunions peuvent être convoquées par le président, le vice-président, le secrétaire-trésorier ou par deux de ses administrateurs. Cependant, durant les quelques dernières années, la Commission a adopté des résolutions pour se réunir moins souvent, et en 2016 elle ne s’est réunie que cinq fois. Les réunions du conseil d’administration se tiennent dans une salle de conférence d’un bâtiment non municipal qui abrite divers services publics (p. ex. santé publique, clinique d’aide juridique). Les membres du public ont le droit d’assister à ces réunions et ils l’ont fait à diverses reprises. Lors des réunions, la Commission discute de la commercialisation des propriétés dont elle dispose et obtient des mises à jour sur de futurs développements en cours d'évaluations environnementales. Nous avons été informés que la Commission examine comment déterminer le prix de chaque propriété, comment mettre en marché les propriétés et comment créer les routes et les divers services. Récemment, la Commission a discuté de cinq propriétés sur un lac particulier, qui seront bientôt prêtes pour la vente.

19           Le Règlement stipule que les réunions doivent se tenir en public, sous réserve de l’exception à l’article 4(6) de l’Elliot Lake Act. Pour ce qui est des avis des réunions, l’article 5.02 du Règlement 1 indique que des avis seront communiqués à chacun des administrateurs au moins deux jours avant toute réunion. Le Règlement ne prévoit pas la communication d’avis au public.

 

L’opinion de la Commission sur l’ouverture

20           La Commission est d’avis qu’elle respecte les exigences des réunions publiques énoncées dans l’Elliot Lake Act. La secrétaire-archiviste de la Commission nous a dit que celle-ci n’est pas tenue de communiquer un avis de ses réunions, et que les réunions de la Commission sont publiques en ce sens que les gens peuvent y assister s’ils se trouvent sur les lieux. Elle a souligné que, bien les réunions se déroulent généralement dans le même endroit et à la même heure, elles peuvent être annulées s’il n’y a pas de questions à examiner ou s’il n’y a pas de quorum. Elle a aussi expliqué que les réunions sont parfois convoquées en toute dernière minute, et que le Règlement 1 permet une certaine souplesse, car deux jours seulement de préavis sont exigés pour informer les administrateurs. Elle a laissé entendre qu’il ne serait pas facile de communiquer des avis au public, dans de telles circonstances. Quand nous lui avons demandé comment des membres du public pourraient savoir qu’une réunion va avoir lieu, elle nous a répondu qu’ils pouvaient s’adresser à la Commission s’ils étaient intéressés.

21           L’ancien président de la Commission nous a dit que, selon lui, des avis des réunions de la Commission pourraient être affichés sur le site Web de la ville, avec un avertissement indiquant qu’elles pourraient être annulées en l’absence du quorum des administrateurs. Le nombre désigné d’administrateurs pour constituer légalement le quorum doit être présent pour traiter des activités de la Commission. L’ancien président nous a dit qu’il avait fait cette suggestion lors d’une réunion de la Commission, mais qu'elle avait été rejetée par un vote. La majorité des administrateurs de la Commission considéraient apparemment que celle-ci respectait l’Elliot Lake Act et qu’elle n’était pas tenue d’informer le public du calendrier de ses réunions.

 

Analyse

22           En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités, chaque municipalité et chaque conseil local doit adopter un règlement de procédure qui régit la convocation, le lieu et le déroulement des réunions. Le règlement doit aussi stipuler que des avis des réunions seront communiqués au public. Les conseils municipaux, les conseils locaux et leurs comités doivent tenir leurs réunions en public, sous réserve de strictes exceptions. Depuis 2008, mon Bureau est en droit d’enquêter sur les plaintes à propos de réunions qui se sont tenues indûment à huis clos, dans les cas où la municipalité n’a pas désigné son propre enquêteur. Nous avons acquis une expérience considérable dans l’application des règles des réunions publiques municipales, dont l’objectif est de renforcer la responsabilisation, la transparence et l’accessibilité au palier local, et de promouvoir le droit du public à assister au processus démocratique.

23           C’est la première fois que mon Bureau enquête sur une plainte à propos de l’Elliot Lake Residential Development Commission, mais en 2012 nous avons traité une plainte de réunion à huis clos à propos de la participation du Conseil municipal d’Elliot Lake à une réunion de cette Commission[2]. La plainte de 2012 alléguait qu’un quorum du Conseil avait assisté à une réunion de la Commission et avait fait un travail préparatoire aux activités du Conseil. Aucun avis de la réunion de la Commission n’avait été communiqué au public, et les membres du public n’avaient donc pas pu y assister. Notre Bureau a conclu qu’en assistant à cette réunion, un quorum du Conseil municipal avait enfreint la Loi sur les municipalités.

24           Dans notre lettre du 10 août 2012 à la Ville, nous avons précisé ceci :

Les renseignements que nous avons reçus sur cette réunion étaient contradictoires, certains indiquant qu’elle avait été publique, et d’autres qu’elle s’était tenue à huis clos. L’ordre du jour de la réunion dressé par la Commission n’est pas mis à la disposition du public mais, à en croire le président de la Commission, les membres du public peuvent connaître les dates de réunion et les sujets de discussion en s’en informant auprès de la municipalité et en demandant à participer aux réunions.

Étant donné qu’aucun avis public n’a été donné à propos de cette réunion et qu’aucun membre du public n’y a assisté, cette réunion ne peut pas être considérée comme une réunion publique en vertu de la Loi sur les municipalités.


25           L’examen en 2012 s’est fait dans le cadre du pouvoir de mon Bureau en tant qu’enquêteur chargé des réunions à huis clos pour la Ville d’Elliot Lake. Par la suite, nous avons précisé que la Ville devrait veiller à ce que les futures réunions entre son Conseil municipal et l’Elliot Lake Residential Development Commission se tiennent conformément aux exigences et à l'esprit de la Loi sur les municipalités.

26           Dans l’examen de la plainte actuelle sur la Commission, je dois déterminer en vertu de mon pouvoir général d’enquête si la Commission tient des réunions à huis clos en violation des dispositions de l’Elliot Lake Act.

27           Contrairement à la Loi sur les municipalités, l’Elliot Lake Act n’exige pas expressément que la Commission communique des avis de ses réunions au public. Mais en pratique, le fait de ne pas afficher d'avis publics va à l’encontre des exigences de la loi stipulant que les réunions doivent se tenir en public. Si les renseignements concernant la date, le lieu et l’heure des réunions ne sont pas facilement accessibles, les membres du public ne pourront jamais savoir qu’ils peuvent y assister, et les réunions se tiendront en fait à huis clos. Ce manque de transparence est contraire à l’esprit et au but de la loi applicable et nuit au processus démocratique.

28           Je ne suis pas convaincu qu’il serait peu pratique de communiquer des avis au public, comme l’affirme la Commission. Le besoin de souplesse dans les calendriers de réunions et la possibilité d’annulation en dernière minute en raison de l’absence de quorum sont compatibles avec la communication d’avis au public. Il n’est pas inhabituel pour les conseils municipaux, les comités et les conseils locaux de se réunir avec un court préavis. Beaucoup de municipalités ont des règlements de procédure qui permettent de ne pas communiquer les avis habituels et de modifier les dispositions d'avis au public, en cas d’urgence. De plus, si la Commission est régulièrement dans l’incapacité de tenir ses réunions en raison de l’insuffisance du quorum, elle peut inclure une note aux avis de réunions indiquant que les réunions ne se tiendront qu’en présence d’un quorum des administrateurs.

29           Par conséquent, le Règlement 1 de la Commission devrait être modifié pour stipuler que des avis des réunions doivent être communiqués au public.

 

Opinion

30           À mon avis, en omettant d’aviser le public de ses réunions, l’Elliot Lake Residential Development Commission agit de manière déraisonnable et erronée, conformément aux alinéas 21(1)a), b) et d) de la Loi sur l’ombudsman.

 

Recommandations

31           En réponse aux préoccupations que j’ai cernées dans mon enquête, et pour améliorer l’accessibilité, la transparence et la responsabilisation de l’Elliot Lake Residential Development Commission, je fais les recommandations suivantes :

 
Recommandation 1

Elliot Lake Residential Development Commission devrait communiquer des avis de toutes ses réunions au public.

 
Recommandation 2

Elliot Lake Residential Development Commission devrait adopter un règlement stipulant que des avis doivent être communiqués au public pour toutes ses réunions, et précisant comment l’avis de ces réunions sera donné au public.


 

Réponse

32           La Commission a eu la possibilité d’examiner et de commenter une version préliminaire de ce rapport pour notre Bureau. Nous n’avons reçu aucun commentaire de la Commission.

33           Mon rapport devrait être communiqué à la Commission et être mis à la disposition du public dès que possible, au plus tard lors de la prochaine réunion de la Commission.


______________________
Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario



[1] Le président de la Commission a démissionné durant notre enquête.
[2] Lettre de l’Ombudsman de l’Ontario à la Ville d’Elliot Lake, (10 août 2012), en ligne.