Canton d’Emo
octobre 13, 2020
13 octobre 2020
L’Ombudsman a reçu une plainte alléguant que le conseil du Canton d’Emo avait enfreint les exigences en matière de réunions publiques énoncées dans la Loi sur les municipalités, le 23 juin 2020. La plainte alléguait que la discussion du conseil sur une question concernant le « Code de conduite du conseil » ne relevait pas des exceptions aux règles des réunions publiques énoncées dans la Loi de 2001 sur les municipalités. L’enquête de l’Ombudsman a conclu que la discussion du conseil était permise en vertu de l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, à l’alinéa 239 (2) b) de la Loi de 2001 sur les municipalités. Toutefois, l’Ombudsman a constaté que le Canton avait enfreint les exigences de l’alinéa 239 (4) a) de la Loi de 2001 sur les municipalités en omettant de préciser par voie de résolution la nature des questions devant être examinées à huis clos.
Enquête sur une réunion à huis clos tenue par le Canton d’Emo le 23 juin 2020
Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario
Octobre 2020
Plainte
1 Mon Bureau a reçu une plainte à propos d’une réunion à huis clos tenue par le conseil du Canton d’Emo (le Canton) le 23 juin 2020. La plainte alléguait que la discussion du conseil sur une question relative au code de conduite du conseil ne relevait pas des exceptions aux règles des réunions publiques énoncées dans la Loi de 2001 sur les municipalités.
Compétence de l’Ombudsman
2 En vertu de Loi de 2001 sur les municipalités[1] (la Loi), toutes les réunions du conseil municipal, d’un conseil local et des comités de l’un ou de l’autre doivent se tenir en public, à moins de relever des exceptions prescrites.
3 Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde aux citoyens le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité a respecté la Loi en se réunissant à huis clos. Les municipalités peuvent nommer leur propre enquêteur. La Loi fait de l’Ombudsman l’enquêteur par défaut pour les municipalités qui n’ont pas désigné le leur.
4 L’Ombudsman est l’enquêteur des réunions à huis clos pour le Canton d’Emo.
5 Quand nous enquêtons sur des plaintes au sujet de réunions à huis clos, nous déterminons si les exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi, et le règlement de procédure de la municipalité, ont été respectés.
6 Pour aider les conseils municipaux, le personnel municipal et les citoyens, nous avons créé un recueil en ligne des décisions de l’Ombudsman sur les réunions publiques, qui comprend des sommaires de cas des réunions publiques examinées par lui. Nous avons conçu ce recueil interrogeable en ligne pour permettre aux intéressés d’accéder facilement aux décisions antérieures de l’Ombudsman et à ses interprétations des règles des réunions publiques. Les membres du conseil et le personnel peuvent consulter ce recueil pour éclairer leurs discussions et leurs décisions afin de déterminer si une question devrait ou pourrait être discutée à huis clos, ainsi que les questions liées à la procédure des réunions publiques. Des résumés des décisions antérieures de l’Ombudsman sont consultables dans ce recueil : www.ombudsman.on.ca/digest/recueil-de-cas-reunions-municipales-accueil
Processus d’enquête
7 En juillet 2020, j’ai informé la municipalité de notre intention d’enquêter sur cette plainte.
8 Nous avons examiné l’ordre du jour de la réunion, le procès-verbal de la séance publique et de la séance à huis clos, ainsi que le règlement de procédure de la municipalité. Nous avons fait des entrevues avec tous les membres du conseil, ainsi qu’avec la greffière municipale/directrice générale (DG)/trésorière.
9 Mon Bureau a obtenu une entière coopération dans cette affaire.
Réunion du 23 juin 2020
10 Le conseil a tenu une réunion ordinaire le 23 juin 2020. Selon le procès-verbal de la réunion, le conseil a adopté une résolution pour se retirer à huis clos à 19 h 47, afin de discuter de « renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, y compris des employés ». L’ordre du jour a également précisé que le conseil discuterait entre autres d’une question relevant du « Code de conduite du conseil ».
11 D’après le procès-verbal de la séance à huis clos, et selon les personnes à qui nous avons parlé, la discussion du conseil à ce sujet portait sur la préoccupation exprimée par un membre du conseil au sujet de courriels échangés entre d’autres conseillers nommés et des membres de la communauté. Les noms des personnes qui avaient envoyé ces courriels, et le contenu de la correspondance, avaient également été divulgués. Ce membre du conseil a discuté de ses préoccupations et de ses opinions sur la conduite des conseillers identifiés à l’égard de ces courriels. Les personnes avec lesquelles nous avons parlé ne se sont pas souvenues d’une discussion précise sur le code de conduite du personnel, ni d’une manière dont les comportements présumés auraient pu être liés au code de conduite.
12 Ces préoccupations ont fait l’objet d’une discussion limitée. L’un des membres du conseil qui étaient nommés a défendu sa conduite et a dit qu’il n’avait pas répondu à certains courriels. D’autres conseillers n’ont pas participé à la discussion, et le conseil n’a donné aucune instruction au personnel au sujet de cette question.
13 Le conseil a repris sa séance publique à 20 h 43. Il n’a pas fait de rapport sur cette question examinée à huis clos.
Analyse
Applicabilité de l’exception des « renseignements privés » aux réunions à huis clos
14 Le conseil a cité l’exception énoncée à l’alinéa 239 (2) b) pour discuter de renseignements privés concernant des personnes qui pouvaient être identifiées durant sa séance à huis clos le 23 juin 2020. L’exception des renseignements privés s’applique aux discussions qui révèlent des renseignements personnels sur des personnes qui peuvent être identifiées.
15 En général, les discussions sur les actions d’un membre du conseil, dans l’exercice de ses fonctions, sont considérées comme de nature professionnelle et ne relèvent pas de l’exception des « renseignements privés »[2]. Toutefois, dans certains cas, des renseignements donnés sur une personne à titre professionnel peuvent relever de l’exception, s’ils révèlent quelque chose de personnel ou se rapportent à l’examen détaillé de la conduite d’une personne[3].
16 Dans une lettre à la Municipalité de Temagami, mon Bureau a conclu que le conseil était en droit de discuter à huis clos d’une plainte contre un membre du conseil, car le personnel n’était pas certain si ce membre du conseil avait agi à titre professionnel ou personnel durant l’incident qui avait donné lieu à la plainte[4]. De même, dans une lettre sur une réunion à huis clos tenue par la Ville d’Elliot Lake, mon Bureau a conclu que la discussion à huis clos sur des allégations non avérées selon lesquelles un membre du conseil aurait enfreint la confidentialité relevait de l’exception des « renseignements privés ». Dans ce cas, les allégations n’avaient pas mené à une enquête et n’avaient pas été rendues publiques, et elles constituaient des renseignements privés à propos d’un membre du conseil[5].
17 Dans le cas présent, la discussion du conseil sur les échanges présumés de courriels entre certains conseillers avait porté sur ces conseillers à titre professionnel, à titre de membres du conseil. Toutefois les préoccupations soulevées comprenaient des renseignements qui étaient hypothétiques, et qui ont été réfutés dans un cas par le membre du conseil qui était nommé. La discussion a porté sur l’examen de la conduite de ces conseillers et sur le partage d’opinions concernant ladite conduite. Cette discussion a donc pris un caractère plus personnel et relevait de l’exception des « renseignements privés ».
Questions de procédure
Résolution pour se retirer à huis clos
18 L’alinéa 239 (4) a) de la Loi stipule qu’avant de se retirer à huis clos une municipalité doit déclarer par voie de résolution, en séance publique, qu’elle tiendra une séance à huis clos et indiquer la nature générale de la question à examiner à huis clos. Dans Farber v. Kingston (City) (2007 ONCA 173), la Cour d’appel de l’Ontario a déterminé que la résolution adoptée pour se retirer à huis clos doit donner une description générale de la question à examiner, de manière à maximiser les renseignements communiqués au public sans compromettre la raison d’exclure le public[6]. Mon Bureau a aussi recommandé que les conseils donnent plus de détails de fond dans leurs résolutions autorisant les séances à huis clos[7].
19 Dans le cas présent, l’ordre du jour de la réunion du conseil le 23 juin 2020 indiquait que le conseil discuterait d’une question de « Code de conduite du conseil » en séance à huis clos. Cependant, la résolution adoptée par le conseil pour se retirer à huis clos ne donnait aucun renseignement sur la discussion qu’il avait l’intention de tenir, si ce n’est une référence à l’exception des « renseignements privés » pour les réunions à huis clos.
20 À l’avenir, la municipalité devrait veiller à ce que ses résolutions adoptées en vue d’un huis clos donnent une description générale de la question à discuter de manière à maximiser les renseignements communiqués au public sans toutefois compromettre la raison d’exclure le public.
Opinion
21 Le conseil du Canton d’Emo n’a pas enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités quand il s’est retiré à huis clos le 23 juin 2020, pour discuter d’un problème de conduite de plusieurs conseillers. Cette discussion était autorisée en vertu de l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, relativement aux réunions à huis clos, à l’alinéa 239 (2) b) de la Loi.
22 Toutefois, le conseil du Canton d’Emo a enfreint les exigences énoncées à l’alinéa 239 (4) a) de la Loi de 2001 sur les municipalités en omettant de préciser par voie de résolution la nature générale des questions à examiner à huis clos.
Recommandations
23 Je fais les recommandations suivantes pour aider le Canton d’Emo à s’acquitter de ses obligations en vertu de la Loi et à renforcer la transparence de ses réunions.
Recommandation 1
Tous les membres du conseil du Canton d’Emo devraient respecter avec vigilance leurs obligations individuelles et collectives de veiller à ce que le conseil s’acquitte de ses responsabilités en vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités et de son propre règlement de procédure.
Recommandation 2
Le Canton d’Emo devrait veiller à ce que les résolutions qu’il adopte pour se retirer à huis clos donnent une description générale de la question à discuter, de manière à maximiser les renseignements communiqués au public sans toutefois compromettre la raison d’exclure le public.
Rapport
24 Le conseil du Canton d’Emo a eu l’occasion d’examiner une version préliminaire de ce rapport et de la commenter pour notre Bureau. Compte tenu des restrictions imposées en raison de la COVID-19, certains ajustements ont été apportés à notre processus normal d’examen préliminaire et nous remercions le conseil de sa coopération et de sa souplesse. Tous les commentaires reçus ont été pris en compte dans la préparation de ce rapport final.
25 Ce rapport sera affiché sur le site Web de mon Bureau et devrait être rendu public par le Canton d’Emo. Conformément au paragraphe 239.2 (12) de la Loi de 2001 sur les municipalités, le conseil devrait adopter une résolution indiquant comment il entend donner suite à ce rapport.
_______________________
Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario
[1] L.O. 2001, chap. 25.
[2] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletOrdonnance du CIPVP MO-2204 (22 juin 2007), en ligne, et Municipalité de Temagami (2017), en ligne.
[3] Ombudsman de l’Ontario, Enquête sur les réunions à huis clos tenues par le Conseil de la Municipalité de South Huron entre novembre 2008 et décembre 2013, (février 2015), paragraphes 31 à 32, en ligne.
[4] Municipalité de Temagami (2017), en ligne.
[5] Ville d’Elliot Lake (2014), en ligne.
[6] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletFarber v. Kingston (City), 2007 ONCA 173, en ligne.
[7] Ombudsman de l’Ontario, Enquête sur la réunion à huis clos tenue par la Niagara District Airport Commission le 14 juillet 2016, (décembre 2016), en ligne.