Canton de Lanark Highlands

Canton de Lanark Highlands

août 6, 2024

6 août 2024

L’Ombudsman a examiné une plainte alléguant que le Comité plénier du Canton de Lanark Highlands avait enfreint les règles de réunions publiques le 27 juin 2023 en discutant à huis clos avec une vérificatrice d’une lettre de recommandations concernant la version provisoire des états financiers.

Il a conclu que cette discussion entre dans l’exception relative à la sécurité des biens de la municipalité, parce que l’information portait sur une menace à la sécurité des biens du Canton. Toutefois, il a statué que le Canton avait enfreint les exigences du paragraphe 239(7) de la Loi de 2001 sur les municipalités le 27 juin 2023 en ne consignant pas adéquatement les discussions tenues à huis clos. Comme pratique exemplaire, l’Ombudsman recommande au Canton d’enregistrer, en format audio ou vidéo, ses séances à huis clos.

Enquête sur des plaintes à propos d’une réunion tenue par le Comité plénier du Canton de Lanark Highlands le 27 juin 2023

Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario

Août 2024

 

Aperçu

1    Mon Bureau a reçu deux plaintes alléguant que le Comité plénier du Canton de Lanark Highlands (le « Canton ») aurait enfreint les règles de réunions publiques le 27 juin 2023. En effet, selon ces plaintes, il aurait été indûment question d’une lettre de recommandations concernant la version provisoire des états financiers durant la partie à huis clos de la réunion.

2    Mon examen a permis d’établir que la discussion sur cette lettre relève de l’exception relative à la sécurité des biens de la municipalité invoquée par le Canton. Cependant, le Canton a bien enfreint les règles de réunions publiques en omettant de rédiger comme il se doit le procès-verbal de la réunion à huis clos.

 

Compétence de l’Ombudsman

3    La Loi de 2001 sur les municipalités[1] (la « Loi ») prévoit que toutes les réunions d’un conseil, d’un conseil local et de leurs comités doivent être ouvertes au public, sauf dans le cas des exceptions prévues par la Loi.

4    Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde à quiconque le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité a respecté ou non la Loi en se réunissant à huis clos. Les municipalités peuvent nommer leur propre enquêteur(euse) ou recourir aux services de l’Ombudsman. La Loi fait de l’Ombudsman l’enquêteur par défaut pour les municipalités qui n’ont pas désigné le(la) leur.

5    L’Ombudsman enquête sur les réunions à huis clos du Canton de Lanark Highlands.

6    Lorsque nous enquêtons sur des plaintes concernant des réunions à huis clos, nous cherchons à savoir si les exigences relatives aux réunions publiques énoncées dans la Loi et dans le règlement de procédure applicable ont été respectées.

7    Depuis 2008, mon Bureau a enquêté sur des centaines de réunions municipales tenues à huis clos dans tout l’Ontario. Pour aider les conseils municipaux, le personnel municipal et le public, nous avons créé un recueil en ligne des cas de réunions publiques. Ce recueil interrogeable vise à permettre aux intéressé(e)s d’accéder facilement aux décisions de l’Ombudsman et à ses interprétations des règles des réunions publiques. Des résumés des décisions antérieures de l’Ombudsman sont consultables dans ce recueil : www.ombudsman.on.ca/digest-fr/accueil.

8    L’Ombudsman de l’Ontario a aussi le pouvoir d’effectuer en toute impartialité des examens et des enquêtes sur des centaines d’organismes du secteur public : municipalités, conseils locaux, sociétés contrôlées par les municipalités, organismes du gouvernement provincial, universités financées par des fonds publics et conseils scolaires. Il peut aussi examiner les plaintes sur les services fournis par les sociétés d’aide à l’enfance et les titulaires de permis d’établissement, et sur les services en français fournis aux termes de la Loi sur les services en français. Pour en savoir plus sur les organismes relevant de notre Bureau, consultez le www.ombudsman.on.ca/portez-plainte/champ-de-surveillance.

 

Processus d’enquête

9    Le 8 novembre 2023, mon Bureau a avisé le Canton de son intention d’enquêter sur ces plaintes.

10    Les membres de l’équipe de mon Bureau chargée des réunions publiques ont examiné les dispositions pertinentes du règlement de procédure du Canton ainsi que la Loi. Nous avons aussi analysé la documentation afférente à la réunion du Comité plénier (le « Comité ») du 27 juin 2023, y compris les procès-verbaux des séances publiques et à huis clos, et une copie de la lettre de recommandations dont il a été question à cette réunion.

11    Enfin, une personne de cette même équipe a discuté avec la greffière et l’ensemble des membres du Conseil ayant assisté à la réunion du Comité.

12    Mon Bureau a obtenu une pleine coopération dans cette affaire.

 

Renseignements généraux

13    Conformément à la Loi de 2001 sur les municipalités, chaque municipalité doit nommer un(e) vérificateur(trice) et rendre publics ses états financiers annuels vérifiés[2].

14    Avant la réunion du Comité du 27 juin 2023, une vérificatrice avait produit une lettre de recommandations concernant la version provisoire des états financiers 2021 du Canton. On nous a dit que la vérificatrice avait demandé qu’un des points de cette lettre soit discuté à huis clos en raison des risques pour la sécurité des biens du Canton.

 

Réunion du Comité plénier du 27 juin 2023

15    Le Comité s’est réuni dans la salle du conseil le 27 juin 2023 à 18 h 08 en présence des sept membres du Conseil.

16    Vers la fin de la partie publique de la réunion, la vérificatrice, présente virtuellement, a fait une présentation aux membres du Comité sur la version provisoire des états financiers de 2021. Cette présentation a été reçue à titre d’information par le Comité.

17    Immédiatement après, à 20 h 49, le Comité s’est retiré à huis clos pour discuter d’un point décrit comme suit : [TRADUCTION] « Lettre de recommandations sur la version provisoire des états financiers ». Il a invoqué l’exception relative à la sécurité des biens de la municipalité pour procéder ainsi.

18    Selon le procès-verbal de la séance à huis clos, la vérificatrice a informé le Comité sur la sécurité des biens du Canton en lien avec la lettre de recommandations. Rien d’autre sur la discussion à huis clos n’y figure.

19    La plupart des membres du Conseil rencontré(e)s par mon Bureau ont qualifié la séance à huis clos de « présentation » ou de « discussion menée par la vérificatrice ». Cinq des sept membres ont dit qu’elle n’avait porté que sur un seul point de la lettre qui ne pouvait être discuté publiquement en raison d’un risque pour la sécurité des biens du Canton. On nous a dit que le Conseil avait été informé de son rôle dans la résolution du problème, qui persistait. On nous a aussi dit que la discussion comportait des détails techniques sur le problème et les moyens de le régler.

20    Un(e) membre du Conseil, qui a dit se souvenir vaguement de cette réunion, croyait que la présentation à huis clos avait porté sur plusieurs sujets et non seulement sur le point mentionné par les cinq autres membres. Un(e) autre a ajouté que la discussion à huis clos portait sur divers problèmes financiers relevés par la vérificatrice.

21    On nous a dit qu’aucune directive n’avait été donnée au personnel pendant le huis clos, et que le Comité avait reçu de l’information. La séance publique avait repris à 21 h 13.

22    En séance publique, le Comité a approuvé la version provisoire des états financiers pour l’exercice se terminant le 31 décembre 2021, telle que présentée par la vérificatrice. La séance avait été levée à 21 h 17.

 

Analyse

Exception relative à la sécurité des biens de la municipalité

23    Le Comité plénier a invoqué l’exception relative à la sécurité des biens de la municipalité pour discuter de la lettre de recommandations concernant la version provisoire des états financiers de 2021.

24    L’alinéa 239(2)a) de la Loi de 2001 sur les municipalités autorise les discussions à huis clos si la sécurité des biens de la municipalité ou du conseil local est en jeu. La Loi ne définit pas le terme « sécurité » pour l’application de l’article 239.

25    Dans un rapport précédent, mon Bureau a conclu que « la sécurité des biens de la municipalité » devrait être interprétée dans son sens ordinaire. Cette expression s’applique donc à la protection des biens contre toute perte ou tout dommage physique, et à la protection de la sécurité du public relativement à ces biens[3]. Cette exception s’applique tant aux biens corporels qu’aux biens incorporels de la municipalité[4].

26    En l’espèce, au vu des éléments de preuve examinés par mon Bureau, je suis convaincu, selon la prépondérance des probabilités, qu’une seule affaire en lien avec une menace à la sécurité des biens du Canton a été abordée à huis clos. Je suis aussi convaincu que la présentation de la vérificatrice sur les problèmes relevés, et la discussion et les questions qui ont suivies, touchaient la sécurité. Par conséquent, les discussions sur ce point entrent dans l’exception relative à la sécurité des biens de la municipalité.

 

Résolution de retrait à huis clos

27    Les plaignant(e)s ont dit à mon Bureau avoir de la difficulté à comprendre comment une lettre de recommandations sur des renseignements financiers pouvait relever de l’exception relative à la sécurité des biens de la municipalité. Comme il a été dit, la résolution de retrait à huis clos décrit simplement la question à étudier comme suit : [TRADUCTION] « Lettre de recommandations sur la version provisoire des états financiers ».

28    Dans Farber v. Kingston (City), la Cour d’appel de l’Ontario a souligné que [TRADUCTION] « la résolution de se retirer à huis clos devrait comporter une description générale de la question à discuter pour maximiser les renseignements communiqués au public, sans compromettre la raison d’exclure le public »[5].

29    Le caractère suffisant de la question indiquée dans la résolution de retrait à huis clos nécessite toujours de trouver l’équilibre, comme l’a expliqué la Cour d’appel de l’Ontario dans l’arrêt Farber. En l’espère, vu la nature délicate du sujet abordé, je conclus que le Canton a indiqué dans sa résolution l’information qui pouvait être communiquée au public.

 

Caractère adéquat du procès-verbal

30    Le procès-verbal de la réunion à huis clos examinée était vague et ne détaillait pas suffisamment les discussions ayant eu lieu. En effet, il ne fait que reprendre le contenu de la résolution de retrait à huis clos, sans mentionner le seul point qui aurait été abordé.

31    Le paragraphe 239(7) de la Loi prévoit que toutes les résolutions, décisions et autres délibérations ayant lieu durant une réunion doivent être consignées, sans remarques. Cette exigence s’applique également aux réunions à huis clos.

32    Dans un rapport de 2018 adressé au Canton de Lanark Highlands, mon Bureau indiquait que les procès-verbaux doivent comprendre une description détaillée des questions de fond et de procédure discutées, et recommandait au Canton de vérifier que les comptes rendus de ses réunions sont complets et exacts[6].

33    Malgré ma précédente recommandation, le procès-verbal de la séance à huis clos du 27 juin 2023 manque de détails de fond et ne décrit pas les délibérations ayant eu lieu pendant la réunion. L’absence de procès-verbal détaillé prive également le Canton d’un compte rendu des délibérations. En l’espèce, les souvenirs des membres du Conseil diffèrent quant à ce qui s’est passé pendant la réunion, ce qui a entravé notre enquête.

34    Le Canton de Lanark Highlands approuve les procès-verbaux de ses réunions à huis clos en séances à huis clos, donc l’information reste confidentielle. Les procès-verbaux doivent inclure : la date et le lieu de la réunion, les personnes présentes, une description détaillée des questions de fond et de procédure étudiées (avec référence aux documents examinés, le cas échéant), les motions adoptées, les votes tenus et les directives données. De plus, les municipalités doivent tenir des dossiers clairs et accessibles à des fins d’examen par les enquêteur(euse)s.

35    Ces dossiers aident notre Bureau à valider que les représentant(e)s municipaux(ales) ne s’écartent pas des exigences légales lors des huis clos. Le Canton doit donc tenir des procès-verbaux détaillés et complets de ses réunions à huis clos.

36    À titre de pratique exemplaire, il serait bon pour le Canton de conserver des enregistrements audio de ses séances à huis clos. Une recommandation en ce sens a aussi été faite dans mon rapport de 2018 au Canton[7]. Les enregistrements audio et vidéo peuvent être très utiles lors d’une enquête. Ils renforcent en outre la confiance du public quant au respect par le Canton des règles de réunions publiques.

37    Si le Canton avait enregistré la réunion du Comité sous forme audio ou vidéo, nous aurions eu, pour notre enquête, des traces complètes et fiables des échanges.

 

Avis

38    Le Comité plénier du Canton de Lanark Highlands n’a pas enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités le 27 juin 2023 lorsqu’il a discuté des risques pour la sécurité des biens du Canton. Ces discussions relèvent de l’exception relative à la sécurité des biens de la municipalité, prévue à l’alinéa 239(2)a) de la Loi.

39    Toutefois, il a contrevenu aux exigences du paragraphe 239(7) le 27 juin 2023 en ne consignant pas adéquatement les discussions tenues à huis clos.

 

Recommandations

40    Je formule les recommandations suivantes pour aider le Canton de Lanark Highlands à remplir ses obligations aux termes de la Loi et à améliorer la transparence de ses réunions :

 
Recommandation 1

Les membres du Conseil de Lanark Highlands devraient s’acquitter de leur obligation individuelle et collective de remplir les responsabilités qui leur incombent selon la Loi de 2001 sur les municipalités et le règlement de procédure du Canton.

 
Recommandation 2

Le Canton de Lanark Highlands devrait tenir des procès-verbaux adéquats de toutes ses réunions à huis clos.

 
Recommandation 3

Comme pratique exemplaire, le Canton de Lanark Highlands devrait enregistrer, en format audio ou vidéo, ses séances à huis clos.



 

Rapport

41    Le Conseil du Canton de Lanark Highlands a pu examiner une version préliminaire du rapport et la commenter pour mon Bureau. Le présent rapport définitif a été rédigé à la lumière de tous les commentaires que nous avons reçus.

42    Le présent rapport sera publié sur le site Web de mon Bureau et devrait aussi être rendu public par le Canton. Conformément au paragraphe 239.2(12) de la Loi de 2001 sur les municipalités, le Conseil doit adopter une résolution indiquant comment il entend y donner suite.

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Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario



[1] L.O. 2001, chap. 25.
[2] Loi de 2001 sur les municipalités, L.O. 2001, chap. 25, articles 294.1 à 296.
[3] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur des plaintes à propos de réunions du conseil et du Comité consultatif conjoint sur la police pour la Ville d’Amherstburg en 2017 et 2018, (juin 2018), en ligne.
[4] Ibid.    
[5] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletFarber v. Kingston (City), 2007 ONCA 173 (CanLII), para 21 [Farber], en ligne.
[6] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une réunion à huis clos du Canton de Lanark Highlands, (janvier 2018), en ligne.
[7] Ibid.