Ville d’Amherstburg

Ville d’Amherstburg

juin 29, 2018

29 juin 2018

L’Ombudsman a reçu trois plaintes alléguant que plusieurs réunions à huis clos tenues par le conseil de la Ville d’Amherstburg et le Comité consultatif conjoint sur la police n’étaient pas conformes aux règles des réunions publiques énoncées dans la Loi sur les municipalités. Ce Comité ne relève pas de la définition de « comité » donnée dans la Loi sur les municipalités si bien que, pour procéder à son examen de ces plaintes, l’Ombudsman s'est fondé sur son droit de surveillance générale des municipalités afin de déterminer si le Comité avait enfreint son mandat. L’Ombudsman a conclu que le Comité ne s’était pas conformé à son mandat quand il avait tenu plusieurs réunions à huis clos en invoquant l’exception de la sécurité des biens. Il a aussi conclu que le conseil avait enfreint la Loi sur les municipalités en tenant une réunion à huis clos en vertu de l’exception de la sécurité des biens, mais qu’il n’avait pas enfreint la Loi en tenant une autre réunion à huis clos en vertu de l’exception des renseignements privés.

Enquête sur des plaintes à propos de réunions du conseil et du Comité consultatif conjoint sur la police pour la Ville d’Amherstburg en 2017 et 2018

Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario

Juin 2018

 

Plaintes

1    En novembre et décembre 2017, mon Bureau a reçu trois plaintes alléguant que plusieurs réunions à huis clos tenues par le conseil de la Ville d’Amherstburg et le Comité consultatif conjoint sur la police (le Comité consultatif) n’étaient pas conformes aux règles des réunions publiques énoncées dans la Loi de 2001 sur les municipalités (la « Loi »).

2    Ces plaintes alléguaient que les réunions suivantes s’étaient indûment tenues à huis clos car elles ne relevaient d’aucune des exceptions énoncées dans la Loi :

a.    une séance à huis clos le 10 juillet 2017 durant laquelle le conseil avait discuté d’une ébauche de demande de propositions (DP) pour les services de police;

b.    quatre réunions à huis clos du Comité consultatif, le 1er juin, le 22 juin, le 6 juillet et le 7 décembre 2017, afin de discuter l’ébauche de DP pour les services de police;

c.    une séance à huis clos le 22 janvier 2018 durant laquelle le conseil avait discuté de la composition du Comité consultatif.


 

Compétence de l’Ombudsman

Plaintes sur les réunions à huis clos

3    En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités, toutes les réunions d'un conseil municipal, d'un conseil local et des comités de l'un ou de l'autre doivent se tenir en public, à moins de relever des exceptions prescrites.

4    Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde aux citoyens le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité s'est conformée à la Loi en tenant une réunion à huis clos. Les municipalités peuvent désigner leur propre enquêteur. La Loi fait de l'Ombudsman l'enquêteur par défaut dans les municipalités qui n'ont pas nommé le leur.

5    L'Ombudsman est chargé d'enquêter sur les réunions à huis clos pour la Ville d’Amherstburg.

6    Quand il enquête sur des plaintes à propos de réunions à huis clos, mon Bureau cherche à déterminer si les exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi et dans le règlement de procédure de la municipalité ont été observées[1].

 

Plaintes générales sur les municipalités

7    De plus, mon Bureau est en droit d’enquêter plus généralement sur les plaintes concernant la conduite administrative des municipalités. Il a notamment le pouvoir d’enquêter sur les plaintes alléguant que des comités non assujettis aux exigences des réunions à huis clos énoncées dans la Loi ne se sont pas conformés à leur mandat, aux politiques et aux procédures[2].

 

Processus d’enquête

8    Le 12 janvier et le 24 janvier 2018, nous avons informé la municipalité que nous avions l’intention d’enquêter sur les plaintes.

9    Mon Bureau a examiné les extraits pertinents de la Loi, du règlement de procédure de la Ville et du mandat du Comité consultatif conjoint sur la police. Nous avons aussi examiné les comptes rendus écrits et sonores des séances publiques et des séances à huis clos des réunions en question, de même que la documentation connexe. Nous félicitons la Ville de faire des enregistrements sonores des réunions de son conseil et de ses comités, car ces enregistrements ont fourni à mon Bureau le compte rendu le plus complet et le plus exact possible. Nous avons interviewé le maire, la greffière et le directeur général (DG).

10    Mon Bureau a obtenu une pleine collaboration dans cette affaire.

 

Les faits

Comité consultatif conjoint sur la police (Comité consultatif)

11    En décembre 2014, le conseil de la Ville d’Amherstburg a résolu de suivre un processus d’établissement des coûts afin de déterminer combien la Police provinciale de l’Ontario (OPP) facturerait à la municipalité pour la prestation des services de police. Il a aussi décidé de rédiger une demande de propositions et de communiquer avec les municipalités avoisinantes pour savoir si elles aimeraient partager les services de police.

12    Pour décider comment mener le processus d’établissement des coûts, la Ville a consulté le Guide d’examen des options pour les services de police, publié par l’Association des chefs de police de l’Ontario. Ce guide recommande de former un Comité directeur/consultatif pour garantir un processus ouvert et transparent dans l’examen des options de services de police.

13    Le Comité consultatif conjoint sur la police a été créé à cette fin en avril 2016 et il a été chargé d’élaborer et de gérer le processus de demande de propositions pour les options de services de police de la Ville d’Amherstburg.

14    Le Comité consultatif est régi par son propre mandat, indiquant que c'est un comité consultatif du conseil, sans aucun pouvoir délégué[3]. Le conseil a adopté ce mandat par voie de résolution le 25 avril 2017.  

15    Le Comité consultatif est composé de sept personnes nommées par le conseil, dont deux conseillers, le DG, le chef des services de police d’Amherstburg, deux membres de la Commission des services policiers d’Amherstburg (non membres du conseil) et un membre de l’Association des policiers d’Amherstburg. Conformément à ce mandat, le DG présidait le Comité consultatif et la greffière de la Ville était secrétaire de séance.

16    Le mandat du comité prévoit que ses réunions doivent se tenir conformément au règlement de procédure de la Ville et au mandat des conseils locaux / comités[4].

17    Le règlement de procédure de la Ville[5] établit les règles de procédure pour les réunions du conseil. Il exige que ces réunions se conforment aux règles des réunions publiques énoncées dans la Loi sur les municipalités. Il indique que les comités de la Ville ne sont pas liés par les règles de procédure, mais qu’ils doivent en tenir compte pour faciliter la tenue des réunions et dans la mesure nécessaire pour se conformer aux lois provinciales.

18    Le mandat des conseils locaux / comités stipule que toutes les réunions des conseils et des comités doivent se tenir en public, sous réserve de l'applicabilité d'une exception énoncée dans la Loi sur les municipalités.

19    Le mandat du Comité consultatif précise que ses réunions doivent se tenir conformément au règlement de procédure et au mandat des conseils locaux / comités. Le règlement de procédure stipule que les comités ne sont pas liés par les règles de la Loi sur les municipalités, mais le mandat des conseils locaux / comités exige des comités qu’ils suivent les règles de la Loi pour les réunions publiques.

20    Le fait que les comités se réfèrent à deux documents (soit le règlement de procédure et leur mandat), avec des directives différentes sur les exigences relatives aux réunions publiques, peut mener à la confusion et à des incohérences. Pour renforcer la responsabilisation et la transparence de ses pratiques en matière de réunions publiques, la Ville devrait veiller à ce que son règlement de procédure et le mandat des conseils locaux / comités énoncent des normes cohérentes pour les pratiques de réunions des comités.

21    L’une des plaintes déposées à mon Bureau faisait part de la préoccupation de son auteur, alléguant que le Comité consultatif se serait indûment réuni en séance à huis clos le 1er juin, le 22 juin, le 6 juillet et le 7 décembre 2017.

 

Réunions du Comité consultatif le 1er juin, le 22 juin et le 6 juillet 2017

22    Lors de ses réunions le 1er juin, le 22 juin et le 6 juillet 2017, le Comité consultatif s’est retiré à huis clos pour discuter de l’ébauche de la DP pour les services de police. Chaque réunion s’est tenue à huis clos en vertu de l’alinéa 239 (2) a) de la Loi sur les municipalités, qui autorise la tenue de discussions à huis clos pour « la sécurité des biens de la municipalité ou du conseil local ».

23    Durant chaque séance à huis clos, le Comité consultatif a examiné l’ébauche de DP et il y a apporté des modifications pour refléter ses discussions. Un consultant externe était présent et a guidé les membres du Comité consultatif dans l’examen de ce document, clause par clause.

 

Réunion du Comité consultatif le 7 décembre 2017

24    À la suite de la réunion du Comité consultatif le 6 juillet 2017, la version finale de la DP a été rédigée et mise à la disposition des soumissionnaires potentiels. Les propositions devaient être remises pour octobre 2017 et une seule proposition a été reçue. Le Comité consultatif s’est réuni de nouveau le 7 décembre 2017 pour discuter de la proposition, en invoquant l’exception des réunions à huis clos pour « la sécurité des biens ».

25    D’après l’enregistrement sonore de la réunion, le Comité consultatif a discuté de la proposition faite par les services de police de Windsor pour déterminer s’il s’agissait d’une option viable pour les services de police à Amherstburg.

26    Après cette discussion, le Comité consultatif est revenu en séance publique et a adopté la motion suivante :

QUE le président du Comité consultatif conjoint sur la police SOIT CHARGÉ DE PRÉPARER un rapport au conseil municipal d’Amherstburg indiquant que la présentation faite par les services de police de Windsor est viable et répond aux exigences de la DP et du Comité consultatif conjoint sur la police;

QUE le Comité consultatif conjoint sur la police recommande que le processus aille de l’avant avec une consultation publique.


 

Réunion du conseil le 10 juillet 2017

27    Le 10 juillet 2017 à 18 h, le conseil s’est réuni dans la salle du conseil pour une réunion ordinaire. À 19 h 45, il a adopté la résolution suivante pour se retirer à huis clos :

Il est résolu que le conseil se retire à huis clos directement après la séance ordinaire conformément à l’article 239 de la Loi de 2001 sur les municipalités, telle que modifiée, pour la raison suivante : …

POINT B – ÉBAUCHE de demande de propositions de services de police – Alinéa 239 (2) a) – sécurité des biens de la municipalité ou du conseil local.


28    Une fois à huis clos, le conseil a reçu une ébauche de la DP de services de police et un rapport du Comité consultatif sur les prochaines étapes du processus de DP. L’enregistrement sonore indique que les membres du conseil ont eu l’occasion de poser des questions et que le DG a fourni des éclaircissements au nom du Comité consultatif.

29    Le conseil a repris la séance publique à 20 h 08 et a adopté cette résolution :

QUE l’administration SOIT AUTORISÉE à procéder à l’émission de la demande de propositions PP-PS-17-15 pour les services de police, invitant la Ville de LaSalle, la Ville de Windsor et la Police provinciale de l’Ontario (OPP) à participer.


30    La réunion a pris fin à 20 h 12.

 

Réunion du conseil le 22 janvier 2018

31    Le 22 janvier 2018, à 17 h, le conseil a tenu une réunion extraordinaire dans la salle du conseil. Après avoir ouvert la séance publique, le conseil a adopté la résolution suivante à 17 h 01 pour se retirer à huis clos :

Que le conseil se retire en réunion à huis clos à 17 h conformément à l’article 239 de la Loi de 2001 sur les municipalités, telle que modifiée, pour les raisons suivantes…

POINT E – Composition du Comité consultatif conjoint sur la police (Comité consultatif) – Alinéa 239 (2) b) – Renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, y compris des employés de la municipalité ou du conseil local.

 
32    L’enregistrement sonore de la réunion indique que, une fois réuni en séance à huis clos, le conseil a discuté d’un incident concernant les membres du Comité consultatif. Le DG a expliqué l’incident au conseil et a discuté des préoccupations exprimées quant à certaines personnes. Celles-ci ont été identifiées par leur nom.

33    Le conseil a discuté de l’incident et a posé des questions à ce sujet, ainsi que sur les personnes nommées. Il a donné des opinions et a parlé de la conduite présumée de ces personnes. Ceux que nous avons interviewés ont dit à mon Bureau que la discussion avait porté sur la conduite desdites personnes notamment sur des allégations et des opinions quant à cette conduite. Ceci a été confirmé par l’enregistrement sonore de la réunion.

34    La séance à huis clos a pris fin à 18 h 38.

 

Analyse

35    Cette enquête porte sur deux types distincts de réunions : réunions du Comité consultatif et réunions du conseil. L’analyse commence par une explication de la source du pouvoir d’enquête de mon Bureau sur les deux types de réunions.

36    Ensuite, le rapport analyse les exceptions des réunions à huis clos citées par le Comité consultatif et le conseil pour justifier leurs discussions à huis clos, dont les suivantes :

  • sécurité des biens – alinéa 239 (2) a);
  • renseignements privés – alinéa 239 (2) b).


      Le rapport analyse aussi d’autres exceptions qui ont été évoquées lors des entrevues avec mon Bureau, et notamment les suivantes :

  • réunions autorisées en vertu d’une autre loi – alinéa 239 (2) g);
  • renseignements communiqués à titre confidentiel – alinéa 239 (2) h).


 

Réunions du Comité consultatif visées par l'enquête en vertu du paragraphe 14 (1) de la Loi sur l’ombudsman

37    Pour les raisons suivantes, l’enquête sur les quatre réunions du Comité consultatif a été menée en vertu du mandat général de mon Bureau qui lui accorde le pouvoir d’enquêter sur les organismes du secteur public, au paragraphe 14 (1) de la Loi sur l’ombudsman, et non pas en vertu des dispositions des réunions publiques.

38    L’alinéa 14.1 (3) a) de la Loi sur l’ombudsman accorde à mon Bureau le droit d’enquêter pour déterminer si une municipalité a respecté l’article 239 de la Loi sur les municipalités et son propre règlement de procédure, adopté en vertu du paragraphe 238 (2) de la Loi.

39    L’article 239 de la Loi sur les municipalités exige que les conseils municipaux, de même que leurs comités et leurs conseils locaux, tiennent leurs réunions en public sous réserve des exceptions énoncées. L’article 238 de la Loi sur les municipalités définit ainsi un « comité » : « comité ou sous-comité consultatif ou autre, ou une entité similaire, dont au moins 50 pour cent des membres sont également membres d’un ou de plusieurs conseils municipaux ou conseils locaux ».

40    Comme seuls deux des sept membres du Comité consultatif sont des conseillers, il ne s'agit pas d'un « comité » tel que défini dans la Loi sur les municipalités[6]. Il n’est donc pas contraint de tenir ses réunions en public en vertu de l’article 239 de la Loi, pas plus qu’il n’est tenu de le faire en vertu du règlement de procédure de la Ville. Toutefois, le mandat du Comité consultatif stipule que ses réunions doivent se tenir en public, sous réserve qu'une exception en vertu de la Loi sur les municipalités s’applique.

41    Mon Bureau a donc examiné si le Comité consultatif était en infraction par rapport à son mandat en tenant ses réunions à huis clos, en vertu du paragraphe 14 (1) de la Loi sur l’ombudsman.

 

Réunions du conseil soumises à enquête en vertu de l’alinéa 14.1 (3) a)

42    L’alinéa 14.1 (3) a) de la Loi sur l’ombudsman accorde à mon Bureau le droit d’enquêter pour déterminer si une municipalité s’est conformée à l’article 239 de la Loi sur les municipalités et à son règlement de procédure adopté en vertu du paragraphe 238 (2) de la Loi. Les réunions à huis clos du conseil le 10 juillet 2017 et le 22 janvier 2018 ont fait l’objet d’une enquête conformément à ce mandat.

 

Exception des réunions à huis clos : Sécurité des biens

43    L’alinéa 239 (2) a) de la Loi sur les municipalités autorise une municipalité à se retirer à huis clos pour discuter de questions qui concernent la « sécurité des biens de la municipalité ou du conseil local ». La Loi ne définit pas ce qu’est la « sécurité » dans le cadre de cet alinéa, mais des enquêtes antérieures effectuées par mon Bureau ont conclu que « la sécurité des biens de la municipalité » devrait être interprétée au sens ordinaire. Cette expression s’applique donc à la protection des biens contre toute perte ou tout dommage physique (par exemple vandalisme ou vol) et à la protection de la sécurité du public relativement à ces biens[7].

44    Mon Bureau, tout comme le Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée (CIPVP), a conclu que lorsqu’il n’y a pas de menace pour les biens de la municipalité, corporels ou incorporels, l’exception de la sécurité des biens ne s’applique pas[8]. Bien que les décisions du CIPVP ne soient pas contraignantes pour mon Bureau, elles peuvent s’avérer informatives.

45    Lors de l’enquête menée par mon Bureau en octobre 2017 sur des réunions à huis clos de la Ville de Deep River[9], nous avons examiné si les discussions relatives aux demandes d’établissement des coûts de services de police relevaient de l’exception des réunions à huis clos pour « la sécurité des biens de la municipalité ». Dans ce cas, la Ville travaillait à un processus d’établissement des coûts avec l’OPP pour décider s’il y avait lieu de conclure un contrat avec cet organisme pour ses services de police. Durant les réunions à huis clos du conseil, la Ville avait discuté d’un plan de consultation visant à obtenir des commentaires du public sur l’avenir des services de police de Deep River. Les membres du conseil ont dit à mon Bureau que l’exception de la sécurité des biens s’appliquait car la discussion portait sur les services et la dotation en personnel de la police ce qui, à leur avis, mettait en jeu la sécurité et la sûreté dans toute la ville, y compris pour les biens municipaux. Le conseil a aussi estimé que l’exception s’appliquait parce que la discussion portait sur les utilisations potentielles de l’actuel quartier général de la police, situé dans un immeuble appartenant à la Ville.

46    Mon Bureau a conclu que ces discussions ne portaient pas sur des menaces, des pertes ou des dommages potentiels pour un bien municipal et qu’elles ne pouvaient pas se tenir dûment à huis clos en vertu de l’exception de la « sécurité des biens de la municipalité », ni d'aucune autre exception aux exigences de la Loi sur les municipalités relativement aux réunions à huis clos.

 

Réunions du Comité consultatif le 1er juin, le 22 juin, le 6 juillet et le 7 décembre 2017

47    Dans ce cas, les enregistrements sonores de la réunion du Comité consultatif indiquent que la discussion lors des réunions du 1er juin, du 22 juin et du 6 juillet 2017 portait sur l’examen de la DP – c’est-à-dire un document public – clause par clause. Le Comité consultatif a discuté des niveaux de services fournis par les services de police d’Amherstburg et de ses attentes et exigences à l’égard des soumissionnaires.

48    Les personnes interviewées ont dit à mon Bureau que, lors des discussions sur les services de police actuels de la Ville, des renseignements avaient été révélés sur les niveaux de dotation en personnel, les rôles des policiers, ainsi que d’autres détails sur le modèle policier. Mon Bureau a été informé que la divulgation publique de ces renseignements aurait posé un risque de sécurité.

49    En ce qui concerne la réunion du 7 décembre 2017, l’enregistrement sonore indique que le Comité consultatif a discuté des résultats du processus de DP et de la proposition faite par les services de police de Windsor. Les personnes interviewées ont dit à mon Bureau que la proposition contenait des renseignements confidentiels et délicats sur les services de police de Windsor, dont la divulgation aurait fait peser une menace sur la sécurité publique.

50    L’exception de « la sécurité des biens » est à interpréter de façon restrictive et s’applique uniquement aux discussions sur la protection des biens de la municipalité contre toute perte ou tout dommage physique et sur la sécurité publique liée à ces biens[10]. L’écoute de l’enregistrement sonore de la réunion et les entrevues que nous avons faites n’ont révélé aucun dommage, menace ou perte potentiels pour les biens municipaux dans les discussions à huis clos du Comité consultatif.

51    Les personnes que nous avons interviewées ont déclaré que des renseignements de nature délicate sur les services de police d’Amherstburg et de Windsor avaient été discutés lors des réunions du Comité consultatif, mais mon Bureau a conclu précédemment que les discussions sur des renseignements de nature délicate ne relèvent pas de l’exception de « la sécurité des biens »[11]. Par conséquent, les discussions du Comité consultatif sur la DP d’établissement des coûts pour les services de police le 1er juin, le 22 juin, le 6 juillet et le 7 décembre 2017 ne relevaient pas de l’exception des réunions à huis clos pour « la sécurité des biens ».

 

Réunion du conseil le 10 juillet 2017

52    De même, le conseil a cité l’exception de « la sécurité des biens » pour discuter de la DP en séance à huis clos le 10 juillet 2017.

53    Comme indiqué ci-dessus, mon Bureau a conclu que, quand il n’existe pas de menace pour un bien municipal, corporel ou incorporel, l’exception de « la sécurité des biens » ne s’applique pas[12].

54    En entrevue, les personnes à qui nous avons parlé nous ont dit que l’exception de « la sécurité des biens » avait été invoquée car les discussions avaient porté sur des questions confidentielles et délicates de propriété intellectuelle et de dossiers financiers des services de police. Par exemple, le conseil avait discuté de renseignements sur les niveaux de services de police essentiels à l’exercice du maintien de l’ordre. Les personnes à qui nous avons parlé ont dit craindre que la divulgation de ces renseignements ne représente une menace pour le public.

55    Cependant, l’exception de « la sécurité des biens » ne s’applique que lorsque le conseil discute strictement d’une menace pour un bien municipal corporel ou incorporel. Dans ce cas, le conseil a en fait discuté des prochaines étapes à suivre pour émettre publiquement une DP particulière relativement aux services de police dans la municipalité. Comme il n’y a pas eu de discussion sur une menace pour les biens de la municipalité, la discussion ne relevait pas de l’exception à l’alinéa 239 (2) a) pour « la sécurité des biens de la municipalité ».

 

Exception des réunions à huis clos : Réunions autorisées en vertu d’une autre loi

56    Durant son entrevue avec mon Bureau, la greffière de la Ville a indiqué aussi que l’alinéa 239 (2) g) de la Loi sur les municipalités aurait autorisé le Comité consultatif à discuter de la DP à huis clos. L’alinéa 239 (2) g) permet à une municipalité de discuter « [d’]une question à l’égard de laquelle un conseil municipal, un conseil, un comité ou une autre entité peut tenir une réunion à huis clos en vertu d’une autre loi ». Bien que le Comité consultatif n’ait jamais invoqué cette exception, la greffière a dit qu’elle aurait pu s’appliquer car la Commission des services policiers de la Ville aurait été en droit de discuter de la DP en privé lors de l'une de ses réunions, en vertu du paragraphe 35 (4) de la Loi sur les services policiers.

57    Le paragraphe 35 (4) de la Loi sur les services policiers stipule que les réunions et les audiences d’une commission de services policiers doivent se tenir en public, sauf dans les circonstances suivantes :

(4) La commission de police peut exclure le public de la totalité ou d’une partie d’une réunion ou d’une audience si elle estime que, selon le cas :

a)    des questions intéressant la sécurité publique pourraient être révélées et, eu égard aux circonstances, l’avantage qu’il y a à ne pas les révéler dans l’intérêt public l’emporte sur l’avantage qu’il y a à respecter le principe de la publicité des instances;

b)    des questions financières ou personnelles de nature intime ou d’autres questions pourraient être révélées qui sont telles qu’eu égard aux circonstances, l’avantage qu’il y a à ne pas les révéler dans l’intérêt d’une personne concernée ou dans l’intérêt public l’emporte sur l’avantage qu’il y a à respecter le principe de la publicité des instances. [soulignement ajouté] [13]


 

Réunions du Comité consultatif le 1er juin, le 22 juin, le 6 juillet et le 7 décembre 2017

58    Rien n’indique dans les documents de la réunion, ni dans son enregistrement, que le Comité consultatif ait cherché à déterminer si cette exception s’appliquerait à sa discussion, et mon Bureau n’a reçu aucune preuve suggérant que la Commission des services policiers avait discuté de la DP en séance à huis clos en vertu du paragraphe 35 (4) de la Loi sur les services policiers. Par conséquent, je ne suis pas convaincu que le Comité consultatif avait le droit de discuter de la DP à huis clos en invoquant l’exception des réunions « autorisées en vertu d'une autre loi ».

 

Réunion du conseil le 10 juillet 2017

59    Comme pour les réunions du Comité consultatif, la greffière a également dit à mon Bureau que l’exception autorisant la tenue d’un huis clos « en vertu d’une autre loi », énoncée à l’alinéa 239 (2) g) de la Loi sur les municipalités, aurait permis au conseil de discuter de l’ébauche de DP à huis clos. Elle a déclaré que si cette même discussion avait eu lieu lors d’une réunion de la Commission des services policiers, elle aurait pu se tenir à huis clos en vertu du paragraphe 35 (4) de la Loi sur les services policiers.

60    Comme indiqué ci-dessus, la Loi sur les services policiers indique deux exceptions qui autorisent les réunions à huis clos pour les commissions des services policiers, chacune d’elles exigeant que l'avantage d’une non-divulgation l’emporte sur l'avantage d’une réunion publique.

61    Comme pour les réunions du Comité consultatif, rien n’indique dans les documents de la réunion ou dans son enregistrement que le conseil ait examiné si cette exception s’appliquerait à sa discussion. De plus, mon Bureau n’a reçu aucune preuve prêtant à croire que la Commission des services policiers aurait discuté de la DP à huis clos en vertu du paragraphe 35 (4) de la Loi sur les services policiers. Par conséquent, je ne suis pas convaincu que le conseil était en droit de discuter à huis clos de la DP en invoquant l’exception des réunions « autorisées en vertu d'une autre loi ».

 

Exception des réunions à huis clos : Renseignements communiqués à titre confidentiel

62    Durant son entrevue, la greffière a aussi parlé à mon Bureau d’une clause de confidentialité qui était incluse à la proposition des services de police de Windsor.

63    La greffière a déclaré qu’en raison de cette clause de confidentialité, la réunion du 7 décembre 2017 devait se tenir à huis clos. Elle a ajouté que des renseignements confidentiels semblables sur les services de police d’Amherstburg avaient été discutés lors des réunions précédentes du Comité consultatif.

64    Je comprends les préoccupations de la municipalité quant au respect de cette clause de confidentialité, mais lors des réunions du Comité consultatif, il n’existait pas d’exception qui permette généralement à une municipalité de se retirer à huis clos pour protéger les renseignements confidentiels d’un tiers. Toutefois, de nouvelles exceptions de la Loi sur les municipalités pour les réunions à huis clos sont entrées en vigueur le 1er janvier 2018, dont des exceptions relatives aux renseignements fournis à titre confidentiel. Il est possible que cette question ait relevé de l’une des nouvelles exceptions, mais celles-ci n’étaient pas encore en vigueur quand le Comité consultatif s’est réuni.

 

Exception des réunions à huis clos : Renseignements privés

65    Le conseil a cité l’alinéa 239 (2) b) de la Loi sur les municipalités pour discuter à huis clos de sujets liés à la composition du Comité consultatif durant la réunion du 22 janvier 2018. L’alinéa 239 (2) b) stipule qu’une municipalité peut discuter de « renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée » en séance à huis clos.

66    En général, les renseignements qui concernent une personne à titre professionnel ne relèvent pas de l’exception des renseignements privés[14]. Toutefois, dans certains cas, ils peuvent relever de cette exception s’ils révèlent quelque chose de personnel[15] ou s'ils ont trait à un examen approfondi de la conduite de cette personne. Mon Bureau a aussi conclu que les discussions sur la conduite de citoyens privés s’inscrivent dans le cadre de l’exception des renseignements privés[16].

67    Dans ce cas, le conseil a discuté de son opinion sur la conduite de diverses personnes identifiées, ainsi que d’allégations de conduite inappropriée de leur part. Cette discussion relevait de l’exception à l’alinéa 239 (2) b) pour les renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée.

 

Opinion

68    Je reconnais que le conseil et le Comité consultatif ont agi de bonne foi en tenant ces réunions à huis clos et je comprends leurs préoccupations au sujet des discussions publiques de renseignements de nature délicate concernant les services de police. Toutefois, au moment de ces réunions, il n'existait pas d’exception qui leur aurait permis de tenir ces discussions en séance à huis clos.

69    Le Comité consultatif a enfreint le mandat des conseils locaux / comités de la Ville, quand il a discuté à huis clos de la DP sur l’établissement des coûts de services de police le 1er juin, le 22 juin, le 6 juillet et le 7 décembre 2017. Ne pas se conformer à ce mandat était une erreur en vertu de l’alinéa 21 (1) d) de la Loi sur l’ombudsman. La discussion sur la demande de propositions ne relevait pas de l’exception de « la sécurité des biens » ni d’aucune autre exception énoncée dans le mandat des conseils locaux / comités.

70    Le conseil de la Ville d’Amherstburg a enfreint la Loi sur les municipalités quand il a discuté de la DP relativement à l’établissement des coûts de services de police en séance à huis clos le 10 juillet 2017. La discussion sur la demande de propositions ne relevait pas des exceptions aux exigences des réunions publiques de la Loi.

71    Le conseil de la Ville d’Amherstburg n’a pas enfreint la Loi sur les municipalités quand il a discuté à huis clos de la composition du Comité consultatif le 22 janvier 2018. La discussion tenue ce jour-là relevait de l’exception des « renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée » énoncée dans la Loi.

 

Recommandations

72    Je fais les recommandations suivantes pour aider la Ville d’Amherstburg à s’acquitter de ses obligations en vertu de la Loi et à renforcer la transparence de ses réunions.
 

Recommandation 1

Tous les membres du conseil de la Ville d’Amherstburg devraient s’acquitter avec vigilance de leurs obligations individuelles et collectives pour garantir que le conseil se conforme à ses responsabilités en vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités et de son règlement de procédure.

 
Recommandation 2

Les membres des comités de la Ville d’Amherstburg devraient se conformer avec vigilance au mandat des conseils locaux / comités.

 
Recommandation 3

La Ville d’Amherstburg devrait veiller à ce qu’aucun sujet ne soit discuté en séance à huis clos à moins de relever clairement de l’une des exceptions légales aux exigences des réunions publiques.

 
Recommandation 4

La Ville d’Amherstburg devrait définir clairement les règles des comités en ce qui concerne la tenue des réunions à huis clos. Le règlement de procédure devrait concorder avec le mandat du comité pour les règles des réunions publiques.



 

Rapport

73    La Ville a eu l’occasion d’examiner une version préliminaire de ce rapport et de la commenter pour notre Bureau. Nous avons tenu compte des commentaires reçus dans la préparation du rapport final.

74    Dans sa réponse, la Ville s’est engagée à modifier son règlement de procédure pour refléter les modifications récentes des exigences des réunions à huis clos énoncées dans la Loi sur les municipalités. En réponse à mes recommandations, elle a aussi indiqué que le règlement modifié énoncerait des exigences uniformes en matière de réunions à huis clos pour les organismes régis par le mandat des conseils locaux / comités.

75    En ce qui concerne l’exception de « la sécurité des biens » pour les réunions à huis clos, la Ville a déclaré que le conseil s'était référé à une documentation des Local Authority Services (LAS) – qui fournissent des services d’enquête sur les réunions à huis clos à plus de 150 municipalités en Ontario – pour décider d’utiliser cette exception. Plus particulièrement, la Ville a fait référence à un document des LAS qui explique que l’exception de « la sécurité des biens » pour les réunions à huis clos « couvre davantage que les serrures des portes et des établissements municipaux ». La Ville a déclaré que les renseignements discutés sur la dotation en personnel, les rôles des policiers et d’autres détails du modèle policier soulevaient la possibilité de « menaces incorporelles » pour les biens de la municipalité et exigeaient un examen à huis clos.

76    Comme indiqué précédemment, mon Bureau, tout comme le Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée, a conclu que l’exception des réunions à huis clos pour « la sécurité des biens » ne se limite pas aux menaces contre les établissements d’une municipalité. Toutefois, il doit être question d'une menace potentielle pour les biens corporels ou incorporels de la municipalité dans la discussion du conseil. Mon examen des comptes rendus de la réunion montre qu'une telle menace n'a pas été discutée.

77    Mon rapport devrait être communiqué au conseil de la Ville d’Amherstburg et mis à la disposition du public dès que possible, au plus tard lors de la prochaine réunion du conseil. Conformément au paragraphe 239.2 (12) de la Loi de 2001 sur les municipalités, le conseil devrait adopter une résolution indiquant comment il compte donner suite à ce rapport.

 
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Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario



[1] Loi sur l’ombudsman, LRO 1990, chap. O6, al. 14 (3) a).
[2] Loi sur l’ombudsman, par. 14 (1) et 13 (2).
[3] Ville d’Amherstburg, « Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletCouncil Meeting Supplementary Agenda » (25 avril 2016) page 5, en ligne.
[4] Ville d’Amherstburg, « Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletLocal Boards/Committees – Terms of Reference », (2015) en ligne.
[5] Ville d’Amherstburg, Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletBY-LAW NO. 2014-91, en ligne.
[6] Le Comité consultatif comprend des membres de la Commission des services policiers d’Amherstburg, mais les commissions de services policiers ne sont pas considérées comme des conseils locaux dans le cadre des règles des réunions publiques énoncées dans la Loi.
[7] Ombudsman de l'Ontario, Enquête visant à déterminer si le Conseil de la Ville de Port Colborne a tenu des réunions à huis clos illégales le 8 mars 2010, le 27 janvier 2014, et le 8 décembre 2014, (novembre 2016), en ligne.
[8] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos d’une réunion tenue par le Conseil de la Ville de Grimsby le 2 mai 2016, (novembre 2016), et Ordonnance MO-2683-I (30 décembre 2011).
[9] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une réunion à huis clos tenue par la Ville de Deep River en mai 2017 et sur des rencontres du groupe de travail consultatif sur le plan de services de police de la Ville, (octobre 2017), en ligne.
[10] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletOrdonnance MO 2468-F (27 octobre 2009)
[11] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos d’une réunion tenue par le Conseil de la Ville de Grimsby le 2 mai 2016, (novembre 2016), en ligne.
[12] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos d’une réunion tenue par le Conseil de la Ville de Grimsby le 2 mai 2016, (novembre 2016), en ligne.
[13] Loi sur les services policiers, LRO 1990, chap. P.15, art. 35.
[14] CIPVP, Ordonnance MO-2204 et Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletCanton de Russell, 2014, en ligne.
[15] Ombudsman de l’Ontario, Plainte sur la réunion du Conseil le 25 octobre 2013, en ligne.
[16] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur les réunions à huis clos tenues par le Conseil de la Municipalité de South Huron entre novembre 2008 et décembre 2013, (mars 2015), en ligne.