Village de Westport
mars 12, 2021
12 mars 2021
L’Ombudsman a reçu une plainte à propos de deux réunions tenues par le conseil du Village de Westport le 15 septembre 2020. La plainte alléguait qu’en raison d’un problème technique, le conseil n’avait pas diffusé en direct la réunion virtuelle du comité plénier ni la réunion extraordinaire du conseil, à l’intention du public. La plainte alléguait que ces réunions s’étaient donc déroulées à huis clos, contrairement à la Loi de 2001 sur les municipalités. L’Ombudsman a confirmé que le public avait été exclu de ces réunions en raison de problèmes techniques et que, par conséquent, elles s’étaient indûment tenues à huis clos.
Enquête sur des réunions tenues par le Village de Westport le 15 septembre 2020
Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario
mars 2021
Plainte
1 Mon Bureau a reçu une plaine à propos de deux réunions tenues par le conseil du Village de Westport le 15 septembre 2020. La plainte alléguait qu’en raison de problèmes techniques, le conseil n’avait pas diffusé en direct la réunion virtuelle du comité plénier ni la réunion extraordinaire du conseil, à l’intention du public. La plainte alléguait que ces réunions s’étaient donc déroulées à huis clos, contrairement à la Loi de 2001 sur les municipalités.
Compétence de l’Ombudsman
2 En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités[1] (la Loi), toutes les réunions d'un conseil municipal, d'un conseil local et des comités de l'un ou de l'autre doivent se tenir en public, à moins qu'elles ne relèvent des exceptions prescrites.
3 Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde aux citoyens le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité a respecté la Loi en se réunissant à huis clos. Les municipalités peuvent nommer leur propre enquêteur. La Loi fait de l'Ombudsman l'enquêteur par défaut pour les municipalités qui n'ont pas désigné le leur.
4 L'Ombudsman est l'enquêteur des réunions à huis clos pour le Village de Westport.
5 Quand nous examinons des plaintes sur des réunions à huis clos, nous cherchons à déterminer si la municipalité a respecté les exigences de la Loi en matière de réunions publiques et son propre règlement de procédure.
6 Depuis 2008, notre Bureau a enquêté sur des centaines de réunions à huis clos. Pour aider les conseils municipaux, le personnel municipal et le public, nous avons créé un recueil en ligne des cas de réunions publiques. Nous avons rédigé ce recueil interrogeable pour permettre aux intéressés d'accéder facilement aux décisions de l'Ombudsman et à ses interprétations des règles des réunions publiques. Les membres du conseil et le personnel peuvent consulter ce recueil pour éclairer leurs discussions et leurs décisions afin de déterminer si certaines questions devraient ou pourraient être discutées à huis clos, ainsi que leurs débats sur des questions de procédure des réunions publiques. Des résumés des décisions antérieures de l'Ombudsman sont consultables dans ce recueil à : https://www.ombudsman.on.ca/digest-fr/accueil.
Processus d’enquête
7 En octobre 2020, j’ai informé la municipalité de mon intention d’enquêter sur cette plainte.
8 Nous avons examiné les ordres du jour et les procès-verbaux des réunions, ainsi que le règlement de procédure de la municipalité. Nous avons également examiné des parties des enregistrements vidéo des réunions du 15 septembre qui avaient été téléchargés par la municipalité sur sa chaîne YouTube. Nous avons fait des entrevues avec la mairesse et le greffier/directeur général (DG).
9 Mon Bureau a obtenu une complète coopération dans cette affaire.
Réunions du 15 septembre 2020
10 Le conseil s’est réuni virtuellement en comité plénier le 15 septembre 2020, à 18 h 00. L’ordre du jour indiquait que, conformément au règlement 2020-10, la réunion se tiendrait à distance. Selon le DG/greffier, la municipalité a pour habitude de convoquer les réunions à distance grâce à la technologie de vidéoconférence Zoom et de diffuser en direct la réunion Zoom sur la chaîne YouTube de la municipalité. Le DG/greffier nous a déclaré que la municipalité compte environ 500 résidents, et a un personnel municipal très réduit. Il nous a dit que la municipalité n’a pas de personnel technique pour prêter assistance lors des réunions virtuelles, et qu’il est responsable de l’utilisation de cette technologie. Il a dit qu’en général il héberge les réunions virtuelles à partir de son propre domicile, car il y dispose d’une meilleure connexion Internet que dans son bureau municipal.
11 Pour la réunion du 15 septembre, nous avons été informés que le DG/greffier avait tenté de commencer la diffusion en direct de la réunion Zoom sur YouTube peu avant le début prévu pour la réunion du comité plénier. Cependant, il avait rencontré une série de problèmes techniques qui l’avaient empêché de le faire. Nous avons été informés qu’il avait tenté de résoudre les problèmes pendant environ 10 minutes, mais qu’il n’avait pas réussi à faire fonctionner la diffusion en direct sur YouTube. Pendant ce temps, le conseil et d’autres personnes qui étaient connectées à Zoom savaient que la réunion était retardée et que le DG/greffier essayait de régler des problèmes techniques de diffusion en direct. Le DG/greffier nous a dit que la municipalité n’a pas de service d’appoint de diffusion en direct sur lequel compter si elle a des problèmes techniques avec YouTube.
12 Une fois que le DG/greffier a constaté que, de toute évidence, la diffusion en direct ne serait pas facile à rétablir, il a préparé un courriel pour faire part des problèmes techniques à certains journalistes et résidents locaux qui avaient précédemment exprimé leur intérêt à assister aux réunions du conseil. Le courriel indiquait que la réunion du conseil ne serait pas diffusée mais qu’elle serait enregistrée puis communiquée après la réunion. De plus, le DG/greffier a parlé au téléphone avec un journaliste local avant le début de la réunion pour l’informer de la situation.
13 Une fois ces étapes franchies, le comité plénier a ouvert sa réunion et le conseil a mené ses travaux sur Zoom, sans aucun moyen pour le public d’y assister. Nous avons été informés que la réunion s’était déroulée sans autre incident et avait été ajournée à 19 h 58. Immédiatement après, le conseil avait convoqué une réunion extraordinaire du conseil pour conclure une question urgente, découlant de la réunion du comité plénier. La réunion extraordinaire du conseil n’a pas été diffusée au public non plus en raison des mêmes problèmes techniques, et elle s’est achevée à 20 h 01.
14 Le DG/greffier nous a dit qu’après la réunion, il avait envoyé un courriel à des journalistes locaux et à certains résidents qui avaient exprimé précédemment leur intérêt à assister aux délibérations du conseil. Ce courriel indiquait que la municipalité avait eu des problèmes de diffusion en direct des réunions du 15 septembre et donnait un lien vers une vidéo des réunions (créée par Zoom) qu’il avait téléchargée sur la page YouTube de la municipalité.
15 Durant leurs entrevues, le maire et le DG/greffier ont tous deux souligné qu’ils n’avaient jamais eu l’intention d’empêcher le public d’assister aux réunions virtuelles du conseil. Tous deux ont indiqué qu’il s’agissait d’une anomalie et que la municipalité n’avait connu aucun problème de diffusion en direct pour toutes les autres réunions du conseil. Chacun d’eux a jugé qu’il était important que les travaux du conseil se déroulent comme prévu le 15 septembre, même si des difficultés empêchaient le public d’assister virtuellement à la réunion. Ils ont indiqué que la municipalité n’avait ni politique ni procédure pour faire face à une telle situation et ils ont déclaré que tout conseil de l’Ombudsman à cet égard serait bienvenu.
Analyse
Obligation de tenir des réunions publiques
16 Le paragraphe 239 (1) de la Loi de 2001 sur les municipalités stipule que toutes les réunions des conseils municipaux doivent se tenir en public, sous réserve d’exceptions restreintes. Le droit qu’ont les citoyens d’assister aux réunions publiques et aux délibérations du conseil constitue le fondement de l’exigence de tenir les réunions municipales en public. Comme l’a déterminé la Cour suprême du Canada dans l’affaire London (Cité) c. RSJ Holdings Inc., les exigences relatives aux réunions publiques énoncées dans la Loi sur les municipalités indiquent que le public est en « droit d’observer le déroulement des travaux du gouvernement municipal »[2].
17 En réponse à la pandémie de COVID-19, la province a modifié les règles des réunions publiques énoncées dans la Loi pour permettre aux municipalités de modifier leurs règlements de procédure afin que le conseil puisse tenir des réunions par voie électronique (paragraphe 238 (3.1)). Toutefois, l’exigence fondamentale de la Loi selon laquelle les réunions doivent se tenir en public est restée inchangée. Les modifications ont simplement donné aux municipalités la possibilité de satisfaire à cette exigence sans exiger que les réunions du conseil se tiennent en personne.
18 Il est incontestable que le public n’a pas pu assister virtuellement aux réunions du 15 septembre 2020 en raison de problèmes techniques de diffusion en direct. Par conséquent, la réunion du comité plénier et la réunion extraordinaire du conseil se sont déroulées indûment à huis clos, contrairement à la Loi de 2001 sur les municipalités. Certes, je comprends les difficultés de la situation pour le DG/greffier et le conseil, et je sais la nécessité réelle de mener les travaux de la municipalité, mais le conseil n’aurait pas dû se réunir et veiller à ces travaux alors que la diffusion en direct ne fonctionnait pas.
19 À l’ère des réunions virtuelles des conseils, les municipalités doivent être préparées aux problèmes techniques et savoir comment y réagir d’une manière conforme à leurs obligations légales en vertu de la Loi sur les municipalités. Au minimum, cela signifie que le conseil ne peut pas mener les travaux de la municipalité quand des problèmes techniques empêchent le public d’accéder à une réunion. Pour se préparer à cette éventualité, les municipalités devraient envisager d’instaurer une politique ou une procédure afin d’informer le personnel, le conseil et le public des mesures que la municipalité prendra en cas de problèmes techniques. Dans la mesure du possible, les municipalités devraient envisager de mettre en place un deuxième système de diffusion en direct de leurs réunions, afin de pouvoir y recourir en cas de difficulté avec le premier système. Les municipalités pourraient aussi envisager de demander à leur personnel de se connecter au flux direct comme s’ils étaient membres du public, afin d’en contrôler la qualité et la clarté.
Opinion
20 Le conseil du Village de Westport a enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités le 15 septembre 2020 en tenant une réunion du comité plénier et une réunion extraordinaire du conseil auxquelles le public n’a pas pu assister en raison de problèmes techniques. Bien que le conseil n’ait pas eu l’intention d’exclure le public de ces réunions, il savait que le public ne pouvait pas y assister et il a décidé néanmoins de convoquer ces réunions et de mener les travaux du conseil.
Recommandations
21 Je fais les recommandations suivantes pour aider le Village de Westport à s’acquitter de ses obligations en vertu de la Loi et à renforcer la transparence de ses réunions.
Recommandation 1
Tous les membres du conseil du Village de Westport devraient s’acquitter avec vigilance de leurs obligations individuelles et collectives pour veiller à ce que le conseil se conforme à ses responsabilités en vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités et de son propre règlement de procédure.
Recommandation 2
Le Village de Westport devrait veiller à ce que le public puisse accéder aux réunions virtuelles du conseil, avant de mener les travaux du conseil.
Recommandation 3
Le Village de Westport devrait adopter une politique sur la tenue des réunions virtuelles du conseil. Cette politique devrait notamment stipuler que les travaux du conseil ne seront pas menés si des problèmes techniques empêchent le public d’assister aux réunions. Elle devrait également définir les mesures que la municipalité prendrait dans ce cas.
Rapport
22 Le conseil du Village de Westport a eu l’occasion d’examiner une version préliminaire de ce rapport et de la commenter pour notre Bureau. À la lumière des restrictions imposées en raison de la pandémie de COVID-19, certaines modifications ont été apportées à notre processus habituel d’examen préliminaire et nous remercions les membres du conseil de leur coopération et de leur souplesse. Tous les commentaires que nous avons reçus ont été pris en compte dans la préparation de ce rapport final.
23 Ce rapport sera affiché sur le site Web de mon Bureau et il devrait être rendu public par le Village de Westport. Conformément au paragraphe 239.2 (12) de la Loi de 2001 sur les municipalités, le conseil devrait adopter une résolution indiquant comment il entend traiter ce rapport.
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Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario
[1] LO 2001, chap. 25.
[2] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletLondon (Cité) c RSJ Holdings Inc., 2007 CSC 29, paragraphe 32.