Ville de Timmins

Ville de Timmins

janvier 23, 2017

23 janvier 2017

L’Ombudsman a reçu une plainte alléguant que le Conseil de la Ville de Timmins avait tenu des discussions durant deux séances à huis clos illégales le 8 août 2016 et le 29 août 2016, à propos des 150e célébrations de la Fête du Canada dans la Ville. L’Ombudsman a conclu que le Conseil avait enfreint la Loi sur les municipalités quand il s’était retiré à huis clos le 8 août 2016 en vertu de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat, et que le Conseil n’aurait pas dû voter durant ce huis clos. L’Ombudsman a déterminé que le Conseil n’avait pas enfreint la Loi sur les municipalités quand il s’était retiré à huis clos le 29 août 2016 en vertu de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat.

Enquête sur une plainte à propos de réunions à huis clos tenues par la Ville de Timmins les 8 et 29 août 2016

Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario

Janvier 2017

 

Plainte

1 En septembre 2016, mon Bureau a reçu une plainte à propos de deux réunions à huis clos tenues par la Ville de Timmins le 8 août et le 29 août 2016.

2 Cette plainte alléguait que la Ville avait tenu des réunions à huis clos illégales pour discuter de plans en vue des célébrations de la Fête du Canada dans la Ville, en 2017 (« 150e célébrations de la Fête du Canada »). La plainte a aussi allégué que la Ville avait indûment donné une directive au maire durant les séances à huis clos.

 

Compétence de l’Ombudsman

3 ‎En vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités, toutes les réunions d'un ‎conseil municipal, d'un conseil local et des comités d'un conseil doivent se ‎tenir en public, sous réserve des exceptions prescrites‎.

4 ‎Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde aux citoyens le droit de ‎demander une enquête visant à déterminer si une municipalité s'est ‎dûment retirée à huis clos en vertu de la Loi. Les municipalités peuvent désigner leur propre enquêteur. La ‎Loi fait de l'Ombudsman l'enquêteur par défaut dans les municipalités qui ‎ne l'ont pas fait.

5 L'Ombudsman est chargé d'enquêter sur les réunions à huis clos pour la Ville de Timmins.

6 Lorsque nous enquêtons sur les plaintes à propos de réunions à huis clos, nous ‎déterminons si les exigences des réunions publiques énoncées dans la Loi et les règles ‎de procédure de la Municipalité ont été respectées.

 

Procédures du Conseil

7 Le Règlement de procédure de la Ville (Règlement no 2007-6570) a été abrogé et remplacé par le Règlement 2016-7914 le 3 octobre 2016. Ces réunions à huis clos ayant eu lieu avant la promulgation du Règlement 2016-7914, le Règlement no 2007-6570 (le « Règlement de procédure ») était en vigueur lors des réunions.

8 Le Règlement de procédure stipule que toutes les réunions doivent se tenir en public, sous réserve des dispositions à l’article 239 de la Loi. Avant de se retirer à huis clos, le Conseil doit indiquer par voie de résolution le fait que la réunion doit se tenir à huis clos et la nature générale de la question devant y être étudiée.

9 De plus, le Règlement de procédure interdit de clore une réunion au public durant un vote, à moins que la réunion ne doive se dérouler à huis clos en vertu du Règlement de procédure ou de la Loi, et que le vote ne porte sur une question de procédure ou ne vise à donner des directives ou des instructions au personnel municipal ou aux personnes dont la Municipalité a retenu les services.

 

Processus d’enquête

10 Le 17 octobre 2016, après avoir effectué un examen préliminaire, nous avons informé la municipalité de notre intention d’enquêter sur cette plainte.

11 Les membres du personnel de mon Bureau ont examiné les extraits pertinents du Règlement de procédure et des politiques de la Ville, ainsi que de la Loi. Ils ont aussi étudié le procès-verbal des réunions à huis clos tenues les 8 et 29 août 2016.

12 Le greffier, le directeur général (DG) et les membres du Conseil qui étaient présents lors des réunions à huis clos ont été interviewés par mon Bureau.

13 Mon Bureau a obtenu une pleine collaboration dans ce dossier.

 

Contexte

Réunion à huis clos du 8 août

14 Le 8 août, le Conseil s’est retiré à huis clos en vertu de l’exception du secret professionnel de l’avocat, énoncée à l’alinéa 239 (2) f) de la Loi. La résolution adoptée pour se retirer à huis clos citait uniquement l’exception du secret professionnel de l’avocat, sans donner d’autres renseignements sur la question à examiner à huis clos. D’après le procès-verbal de la réunion à huis clos, le Conseil a discuté de deux questions. La seconde portait sur les 150e célébrations de la Fête du Canada.

15 Tout le Conseil, le greffier et plusieurs membres du personnel étaient présents durant la séance à huis clos. Les avocats de la Ville n’ont pas assisté à la discussion sur les 150e célébrations de la Fête du Canada.

16 Lors de la discussion à huis clos sur les 150e célébrations de la Fête du Canada, le maire a informé le Conseil que les organisateurs d’un concours international de feux d’artifice étaient intéressés à tenir le concours 2017 dans la Ville. Il a aussi fait savoir au Conseil que le promoteur d’un grand artiste souhaitait donner un spectacle dans le Ville. Le maire a présenté un concept préliminaire de festival, qui coïnciderait avec les 150e célébrations de la Fête du Canada, qui comprendraient le concours international de feux d’artifice et le concert de cet artiste.

17 D’après le maire, le but de la réunion à huis clos était de déterminer si le Conseil souhaitait accueillir cet événement avant d'entamer de plus amples discussions avec les organisateurs du concours de feux d’artifice et avec l'artiste.

18 Après la discussion, le Conseil est parvenu à un consensus verbal et a demandé au maire de poursuivre les discussions avec les organisateurs du concours de feux d’artifice et avec l'artiste.

19 Le DG se souvient d'avoir rencontré les avocats de la Ville le 8 août 2016 pour discuter des 150e célébrations de la Fête du Canada. Cependant, d’après les membres du Conseil que nous avons interviewés, le Conseil municipal n’a pas discuté de conseils écrits ou verbaux des avocats de la Ville lors de son huis clos. Le greffier a dit à mon Bureau qu’il ne savait pas que les avocats de la Ville avaient été contactés avant la réunion à huis clos. De son côté, le maire a déclaré à mon Bureau que les avocats de la Ville avaient été contactés à un moment donné, mais il ne pouvait pas se souvenir si le Conseil avait discuté de conseils juridiques en séance à huis clos.

20 Après la séance à huis clos, le Conseil a repris sa réunion en public.

 

Réunion à huis clos du 29 août

21 Le 29 août, le Comité plénier s’est réuni à huis clos en vertu des exceptions des litiges actuels ou éventuels, de l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds, et des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat. La résolution adoptée pour se retirer à huis clos a uniquement cité ces exceptions, sans donner plus de renseignements sur les questions à examiner à huis clos. D’après le procès-verbal de la réunion à huis clos, le Conseil a discuté de quatre questions à huis clos. La quatrième portait sur les 150e célébrations de la Fête du Canada.

22 Bien que la résolution adoptée pour se retirer à huis clos ne le précise pas clairement, le greffier a confirmé que le Comité plénier avait discuté des 150e célébrations de la Fête du Canada en vertu de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat.

23 Tout le Conseil (sauf le conseiller Joe Campbell), le greffier, le DG et plusieurs membres du personnel étaient présents à la séance à huis clos. Les avocats de la Ville n’ont pas assisté à la réunion.

24 Durant la réunion, le Comité plénier a examiné une copie d’une ébauche de contrat entre la Ville et l'artiste. Le DG a communiqué des conseils juridiques qu’il avait obtenus de l’avocat de la Ville sur cette ébauche de contrat et sur le concept d’un festival en général. Le maire a aussi fait une brève mise à jour sur les négociations entreprises par la Ville avec l'artiste, et il a présenté une estimation de budget fondée sur ses discussions avec les représentants de cet artiste.

25 Après la discussion, le maire a demandé au Comité plénier de lui donner des directives en vue de négocier une réduction de coûts pour le concert. Le Comité plénier lui a donné des directives par consensus verbal. Le procès-verbal de la réunion à huis clos ne mentionne ni le vote du Comité, ni les directives données au maire.

 

Analyse

26 La Ville a cité l’exception des « conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat » quand il s’est retiré à huis clos pour discuter des 150e célébrations de la Fête du Canada, les 8 et 29 août.

27 L’alinéa 239 (2) f) de la Loi autorise la tenue de discussions à huis clos pour que le Conseil examine les conseils d'un avocat, ou des communications connexes.[1]

28 Le secret professionnel de l’avocat ne peut s’appliquer aux communications que s’il s’agit : a) d’une communication entre un client et son avocat, l’avocat agissant à titre professionnel; b) qui comporte une consultation ou un avis juridique; c) que les parties considèrent de nature confidentielle[2]. Par conséquent, l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat ne peut être invoquée que si le Conseil ou un comité a réellement à examiner des conseils ainsi protégés.

29 Mon Bureau a conclu que l’avocat qui fournit des conseils juridiques ne doit pas obligatoirement être présent à la réunion, aussi longtemps que les conseils obtenus auprès de lui sont alors communiqués[3].

 

Séance à huis clos du 8 août

30 Durant la séance à huis clos du 8 août, le Conseil n’a discuté d’aucun conseil juridique à propos des 150e célébrations de la Fête du Canada. Certes, le DG avait rencontré les avocats de la Ville à ce sujet, le jour même, mais il n’avait pas communiqué le moindre conseil juridique obtenu par lui au Conseil, durant la séance à huis clos.

31 Par conséquent, la discussion tenue le 8 août ne relevait pas de l’exception à l’alinéa 239 (2) f) concernant les conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat.

 

Séance à huis clos du 29 août

32 Après la réunion du 8 août, le DG a demandé des conseils juridiques à l’avocat de la Ville sur l'ébauche de contrat de l’artiste dont le maire avait parlé pour les 150e célébrations de la Fête du Canada, et sur le concept d’un festival en général.

33 Durant la séance à huis clos du 29 août, le DG a communiqué les conseils juridiques au Comité plénier. Le Conseil a discuté des conseils juridiques, sur lesquels il s’est appuyé pour examiner l’ébauche de contrat.

34 Par conséquent, la discussion tenue le 29 août relevait de l’exception à l’alinéa 239 (2) f) concernant les conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat.

 

Directives au maire durant les séances à huis clos

35 La Loi permet de voter à huis clos uniquement dans des circonstances restreintes, pour traiter de questions de procédure ou pour donner des directives aux employés ou aux agents municipaux. Le paragraphe 239 (6) de la Loi stipule ceci :

Exception
(6) Malgré l’article 244, une réunion peut se tenir à huis clos au moment du vote si :
a) d’une part, le paragraphe (2) ou (3) autorise ou exige la tenue à huis clos de la réunion
b) d’autre part, le vote porte sur une question de procédure ou vise à donner des directives ou des instructions aux fonctionnaires, agents, employés ou mandataires de la municipalité, du conseil local ou d’un comité de l’un ou de l’autre, ou aux personnes dont la municipalité ou le conseil local a retenu les services, à contrat ou non.


36 L’article 225 de la Loi fait du président du Conseil (le maire) le chef de la direction de la Municipalité et énumère les fonctions qui lui incombent. Mon Bureau a précédemment conclu qu’un vote à huis clos visant à donner des directives à un maire était autorisé en vertu du paragraphe 239 (6)[4].

37 Le 8 août, le Conseil a demandé au maire de poursuivre les discussions avec les organisateurs du concours de feux d’artifice et avec l'artiste, en vue des 150e célébrations de la Fête du Canada. J’ai déjà conclu que les discussions du Conseil sur les 150e célébrations de la Fête du Canada, le 8 août, ne relevaient pas de l’exception citée. Par conséquent, le Conseil n’était pas autorisé à voter en séance à huis clos. La directive donnée au maire par le Conseil constituait donc une infraction à la Loi.

38 Le 29 août, le Comité plénier a demandé au maire de continuer à négocier avec l'artiste. Le procès-verbal de la réunion à huis clos n’a pas rendu compte de cette directive. Les discussions à huis clos du Comité plénier le 29 août relevaient de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat. Par conséquent, la directive donnée alors au maire était autorisée en vertu de la Loi.

 

Questions de procédure

39 Notre enquête a aussi révélé certains problèmes de procédure relativement aux pratiques de réunions publiques de la Ville.
 


Comptes rendus des réunions à huis clos

40 Quand le Conseil vote à huis clos, il devrait clairement identifier le point sur lequel il vote, voter officiellement sur ce point, et consigner le résultat dans le procès-verbal de la séance à huis clos.
 


Résolution pour se retirer à huis clos

41 Le paragraphe 239 (4) de la Loi stipule que la résolution adoptée pour se retirer à huis clos doit indiquer la nature générale de la question à examiner. Le Règlement de procédure de la Ville comporte des exigences équivalentes.

42 Dans Farber v. Kingston (City)[5], la Cour d’appel a déclaré ceci :

La résolution de se retirer en séance à huis clos devrait comporter une description générale de la question à discuter, de sorte à maximiser les renseignements communiqués au public, sans toutefois porter atteinte à la raison d’exclure le public.


43 Mon Bureau a aussi recommandé que les conseils municipaux donnent des renseignements plus détaillés dans les résolutions adoptées pour se retirer à huis clos. Par exemple, dans un examen fait en 2015 par notre Bureau sur des réunions à huis clos dans la Municipalité de South Huron, nous avons souligné que la résolution du Conseil « devrait donner une brève description de la question à examiner à huis clos »[6].

44 Dans ce cas, les résolutions adoptées par la Ville pour se retirer à huis clos les 8 et 29 août n’ont pas donné de renseignements significatifs au public sur les questions à discuter à huis clos. De plus, les résolutions ne précisaient pas quelle exception des réunions à huis clos était invoquée pour chacune des questions inscrites à l’ordre du jour de la réunion à huis clos.

 

Opinion

45 Le Conseil de la Ville de Timmins a enfreint la Loi de 2001 sur les municipalités et le Règlement de procédure de la Ville quand il a discuté à huis clos des 150e célébrations de la Fête du Canada le 8 août 2016. Ces discussions ne relevaient pas de l’exception citée en vertu de la Loi, concernant les conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat.

46 De plus, comme le huis clos n’était pas permis en vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités, le Conseil n’était pas légalement en droit de donner de directive au maire durant la réunion pour lui demander de poursuivre des discussions avec les organisateurs du concours de feux d’artifice et avec l’artiste.

47 Le Comité plénier de la Ville de Timmins n’a enfreint ni la Loi de 2001 sur les municipalités, ni son Règlement de procédure, quand il a discuté de conseils juridiques au sujet des 150e célébrations de la Fête du Canada, en séance à huis clos, le 29 août 2016, en vertu de l’exception du secret professionnel de l’avocat. Comme les discussions à huis clos tenues par le Conseil étaient permises en vertu de la Loi, la directive donnée au maire à cet égard durant cette réunion était autorisée elle aussi en vertu de la Loi.

 

Recommandations

48 Je fais les recommandations suivantes pour aider la Ville à s’acquitter de ses obligations en vertu de la Loi et pour renforcer la transparence de ses réunions.

 
Recommandation 1

Tous les membres du Conseil de la Ville de Timmins devraient se conformer avec vigilance à leurs obligations individuelles et collectives pour garantir que le Conseil s’acquitte de ses responsabilités en vertu de la Loi de 2001 sur les municipalités et de son propre Règlement de procédure.

 
Recommandation 2

La Ville de Timmins devrait veiller à ne discuter d’aucun sujet en séance à huis clos, à moins qu'il ne relève clairement de l’une des exceptions légales aux exigences des réunions publiques.

 
Recommandation 3

La Ville de Timmins devrait veiller à ce que ses votes à huis clos se déroulent conformément au paragraphe 239 (6) de la Loi de 2001 sur les municipalités.

 
Recommandation 4

La Ville de Timmins devrait veiller à ce que ses résolutions pour se retirer à huis clos donnent une description générale de la question à discuter, de sorte à maximiser les renseignements communiqués au public, sans porter atteinte à la raison d’exclure le public.



 

Rapport

49 La Ville de Timmins a eu la possibilité d’examiner une version préliminaire de ce rapport et de la commenter. Nous avons tenu compte de tous les commentaires reçus pour préparer ce rapport final.

50 Mon rapport devrait être communiqué au Conseil de la Ville de Timmins et mis à la disposition du public dès que possible, au plus tard lors de la prochaine réunion du Conseil.

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Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario



[1] Ombudsman de l’Ontario, « Gouverner la municipalité dans la furtivité », Enquête sur la réunion à huis clos du Conseil du Canton d’Emo le 8 avril 2008 (janvier 2009), en ligne.
[2] Ombudsman de l’Ontario, Enquête visant à déterminer si le Comité des priorités stratégiques et des politiques de la Ville de London a tenu une réunion illégale le 2 mars 2015 (juin 2015), en ligne.
[3] Lettre de l’Ombudsman de l’Ontario au Comté de Norfolk (mai 2016), en ligne.
[4] Lettre du Bureau de l’Ombudsman à la Ville du Grand Sudbury (14 février 2013), en ligne.
[5] Farber v. Kingston (City), 2007 ONCA 173 au par. 21.
[6] Ombudsman de l’Ontario, Enquête sur les réunions à huis clos tenues par le Conseil de la Municipalité de South Huron (février 2015) au par. 58, en ligne.