Canton de Jocelyn

Canton de Jocelyn

septembre 6, 2024

6 septembre 2024

L’Ombudsman a mené une enquête sur les séances à huis clos que le Conseil du Canton de Jocelyn a tenues les 10 et 13 janvier, le 7 février, le 4 avril et le 10 octobre 2023. Il a conclu que les discussions à chacune de ces séances entraient dans différentes exceptions relatives aux réunions à huis clos prévues dans la Loi de 2001 sur les municipalités. Toutefois, il a également jugé que le Canton avait contrevenu à la Loi lors de sa réunion du 10 octobre en omettant d’adopter une résolution de retrait à huis clos, en omettant de rédiger un procès-verbal de la séance à huis clos et en bloquant indûment l’accès du public au début de la réunion. Même s’il n’y a eu aucun vote illégal à ces réunions, l’Ombudsman recommande au Conseil comme pratique exemplaire de signaler clairement toute directive particulière donnée lors d’une séance à huis clos, de tenir un vote en bonne et due forme à ce sujet et de consigner ce vote dans le procès-verbal de la séance à huis clos.

Enquête sur les réunions tenues par le Conseil du Canton de Jocelyn les 10 et 13 janvier, le 7 février, le 4 avril et le 10 octobre 2023

Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario

Septembre 2024

 

Plainte

1    Mon Bureau a reçu trois plaintes selon lesquelles le Conseil du Canton de Jocelyn (le « Canton ») aurait tenu, les 10 et 13 janvier, le 7 février, le 4 avril et le 10 octobre 2023, des réunions à huis clos qui n’entraient pas dans les exceptions relatives aux réunions à huis clos prévues dans la Loi de 2001 sur les municipalités[1] (la « Loi »). Selon l’une de ces plaintes, il y aurait eu des votes illégaux lors des quatre premières de ces réunions à huis clos. Une autre plainte alléguait que les membres du public n’avaient pas pu assister au début de la réunion du 10 octobre 2023 parce que les portes de la salle de réunion étaient verrouillées.

2    Mon enquête a confirmé que les discussions tenues à huis clos à chacune des dates susmentionnées entraient dans les exceptions relatives aux réunions à huis clos prévues dans la Loi. De plus, elle m’a permis de conclure qu’aucun vote illégal n’avait été tenu lors des réunions des 10 et 13 janvier, du 7 février et du 4 avril 2023. Toutefois, il est recommandé comme pratique exemplaire que le Conseil signale clairement les éventuelles directives spécifiques données à huis clos, qu’il tienne un vote formel à leur sujet et qu’il consigne les résultats de ce vote dans le procès-verbal de la séance à huis clos.

3    Enfin, mon enquête m’a permis de conclure que même si la discussion tenue à huis clos le 10 octobre 2023 entre dans l’exception invoquée concernant les conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e), le Canton a contrevenu à la Loi en omettant d’adopter une résolution de retrait à huis clos, en ne consignant pas la séance à huis clos dans un procès-verbal et en bloquant abusivement l’accès du public au début de la réunion du fait d’avoir verrouillé la porte de la salle du conseil.

 

Compétence de l’Ombudsman

4    La Loi dispose que toutes les réunions d’un conseil ou d’un conseil local et de leurs comités doivent être ouvertes au public, sauf si les exceptions prévues par la Loi s’appliquent.

5    Depuis le 1er janvier 2008, la Loi accorde à quiconque le droit de demander une enquête visant à déterminer si une municipalité ou un conseil local a respecté ou non la Loi en se réunissant à huis clos. La Loi fait de l’Ombudsman l’enquêteur par défaut pour les municipalités qui n’ont pas désigné le(la) leur.

6    C’est l’Ombudsman qui enquête sur les réunions à huis clos du Canton de Jocelyn.

7    Lorsque nous enquêtons sur des plaintes concernant des réunions à huis clos, nous cherchons à savoir si les exigences relatives aux réunions publiques énoncées dans la Loi et le règlement de procédure municipal ont été respectées.

8    Depuis 2008, mon Bureau a enquêté sur des centaines de réunions à huis clos. Pour aider les conseils municipaux, le personnel municipal et le public, nous avons créé un recueil en ligne des cas de réunions publiques. Ce recueil interrogeable vise à permettre aux intéressé(e)s d’accéder facilement aux décisions de l’Ombudsman et à ses interprétations des règles des réunions publiques. Les membres du Conseil et le personnel peuvent consulter ce recueil pour éclairer leurs discussions et leurs décisions afin de déterminer si certaines questions devraient ou pourraient être discutées à huis clos, ainsi que pour examiner les questions liées aux procédures des réunions publiques. Des résumés des décisions antérieures de l’Ombudsman sont consultables dans ce recueil : www.ombudsman.on.ca/digest-fr/accueil.

9    L’Ombudsman de l’Ontario a aussi le pouvoir d’effectuer en toute impartialité des examens et des enquêtes sur des centaines d’organismes du secteur public : municipalités, conseils locaux, sociétés contrôlées par les municipalités, organismes du gouvernement provincial, universités financées par des fonds publics et conseils scolaires. Il peut aussi examiner les plaintes sur les services fournis par les sociétés d’aide à l’enfance et les titulaires de permis d’établissement, et sur les services en français fournis aux termes de la Loi sur les services en français. Pour en savoir plus sur les organismes relevant de notre Bureau, consultez le www.ombudsman.on.ca/portez-plainte/champ-de-surveillance.

 

Processus d’enquête

10    Mon Bureau a informé la Municipalité de son intention d’enquêter sur ces plaintes le 23 novembre et le 14 décembre 2023.

11    Mon Bureau s’est entretenu avec le maire, tou(te)s les conseiller(ère)s ayant assisté aux réunions en question, le trésorier, l’administratrice de bureau et le greffier adjoint. Nous avons examiné le règlement de procédure du Canton, les ordres du jour des réunions, les procès-verbaux des séances publiques et les documents afférents à chacune des cinq réunions. Nous avons aussi examiné les procès-verbaux des séances tenues à huis clos pour toutes les réunions, sauf celle du 10 octobre 2023, pour laquelle aucun procès-verbal n’a été rédigé.

12    Mon Bureau a obtenu une pleine coopération dans cette affaire.

 

Réunion du Conseil du 10 janvier 2023

13    Le 10 janvier 2023, le Conseil a tenu une réunion ordinaire dans sa salle. Après un certain temps en séance publique, il a résolu de se retirer à huis clos pour discuter du point [Traduction] « Emprise de P Line et d’Otter Lake Road » en invoquant l’exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds et celle des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e).

14    Cette séance à huis clos comprenait deux parties. Le Canton avait récemment appris qu’un tronçon d’une route appartenant à la Municipalité passait dans deux biens-fonds privés. Le Canton a discuté des moyens de résoudre les problèmes découlant de cette situation tout en maintenant l’accès du public à un lac situé à proximité.

15    Dans la première partie de la discussion, le Conseil a examiné la correspondance de l’avocat(e) de l’un(e) des propriétaires touché(e)s et en a discuté. Des solutions y étaient proposées au Conseil.

16    Pour la seconde partie de la discussion à huis clos, une autre personne du public touchée par la question avait été invitée à participer. Celle-ci a fait une proposition au Conseil en vue de résoudre le problème.

17    Après cette discussion, le Conseil a repris la séance publique et résolu de donner à la greffière la directive d’organiser une réunion avec le conseiller juridique du Canton le 13 janvier 2023 pour obtenir des conseils sur la question.

 

Analyse

Exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e), alinéa 239(2)f)

18    Le Conseil a invoqué l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e) pour discuter du point « Emprise de P Line et d’Otter Lake Road » à huis clos.

19    Au titre de cette exception, une réunion ou une partie d’une réunion peut être tenue à huis clos si la discussion comporte des communications entre la municipalité et son avocat(e) visant à demander ou obtenir des conseils qui doivent rester confidentiels[2]. L’exception vise à ce que les responsables municipaux(ales) puissent échanger librement sur des avis juridiques, sans crainte de divulgation.

20    Notre enquête n’a pas permis de repérer des cas où le Conseil aurait sollicité ou reçu des conseils juridiques protégés par le secret professionnel de l’avocat(e) lors de sa séance à huis clos du 10 janvier 2023. Par conséquent, la discussion à huis clos n’entrait pas dans l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e).

 

Exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds, alinéa 239(2)c)

21    Le Conseil a également invoqué l’exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds pour sa séance à huis clos du 10 janvier 2023. Cette exception vise à protéger la position de la Municipalité lors de négociations concernant une transaction foncière. Pour qu’elle s’applique, la Municipalité doit être soit le vendeur soit l’acheteur du bien-fonds. De plus, les discussions doivent porter sur une transaction foncière réelle et concrète en cours ou projetée.

22    Mon Bureau a déjà conclu que cette exception s’appliquait aux discussions sur la façon de disposer d’un bien-fonds en particulier. Dans une lettre de 2014 à la Ville d’Ajax, il était question d’une enquête de mon Bureau sur une réunion à huis clos où le Conseil avait discuté d’un problème d’empiétement sur une propriété municipale, y compris la question de savoir s’il y avait lieu ou non de vendre ou de louer, en totalité ou en partie, le terrain au(à la) propriétaire[3]. Mon Bureau avait conclu que l’exception d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds s’appliquait à cette discussion, car le Conseil étudiait la manière de disposer du bien-fonds.

23    Dans le cas qui nous occupe, la première partie de la discussion du Conseil avait trait à différentes solutions pour l’acquisition du bien-fonds que traverse un tronçon d’une route municipale, notamment au prix que le Canton pourrait payer pour acquérir ce bien-fonds, et le terrain qu’il serait prêt à céder en échange.

24    Dans la seconde partie, le Conseil a discuté de la façon dont il pourrait opérer la transaction foncière proposée comme solution potentielle au problème de l’accès public à un lac.

25    Le Canton devait potentiellement effectuer des transactions avec plusieurs propriétaires pour régler l’affaire entourant les limites du chemin Otter Lake. L’entente conclue pour chaque transaction aurait des effets sur la position de négociation du Canton dans d’autres négociations afférentes.

26    Par conséquent, le Conseil avait une position de négociation à protéger concernant l’acquisition d’un bien-fonds pendant les deux parties de la discussion à huis clos, et je suis convaincu que la discussion du 10 janvier 2023 entrait dans l’exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds.

 

Vote

27    Aux termes du paragraphe 239(6) de la Loi, le vote ne peut se faire à huis clos que si la question peut ou doit être discutée à huis clos et que le vote porte sur une question de procédure ou vise à donner des directives ou des instructions à des fonctionnaires, agent(e)s, employé(e)s ou mandataires d’une municipalité, d’un conseil local ou d’un comité de l’un ou l’autre, ou aux personnes dont les services ont été retenus, à contrat ou non.

28    Il n’y a pas de preuve que le Conseil a tenu un vote pendant sa séance à huis clos du 10 janvier 2023.

 

Réunion du Conseil du 13 janvier 2023

29    Le 13 janvier 2023, le Conseil s’est réuni dans sa salle. Il s’est peu après retiré à huis clos pour discuter des points [Traduction] « Otter Lake Road » et « Emprise de P Line et d’Otter Lake Road » qui figuraient à l’ordre du jour en invoquant, dans cet ordre, l’exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds et celle des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e).
 
30    À huis clos, l’avocat(e) de l’un(e) des propriétaires privé(e)s touché(e)s a brièvement discuté avec le Conseil au sujet d’une éventuelle transaction foncière. L’avocat(e) a ensuite quitté la séance à huis clos.

31    Ensuite, le Conseil a demandé les conseils juridiques de l’avocat du Canton concernant cette proposition. Il s’est aussi entretenu avec lui au sujet de la proposition soumise à sa réunion à huis clos précédente.

32    Après cette discussion, le Conseil a repris la séance publique et résolu de donner à l’avocat du Canton la directive de négocier un échange de terrains avec l’avocat(e) du(de la) propriétaire en question, et de tenir une réunion publique le 7 février 2023 pour achever son plan concernant les tronçons touchés du chemin P Line.

 

Analyse

Applicabilité de l’exception relative aux conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e), alinéa 239(2)f)

33    Le Conseil s’est retiré à huis clos le 13 janvier 2023 en invoquant l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e) pour discuter des chemins P Line et Otter Lake. Comme il a été dit plus haut, cette exception admet qu’une municipalité se retire à huis clos pour tenir une discussion ou recevoir des conseils au sujet d’une question protégée par le secret professionnel de l’avocat(e)[4].

34    Au début de la discussion, le Conseil a écouté les observations de l’avocat(e) de l’un(e) des propriétaires avec qui il négociait. Il n’y a aucune preuve que le Conseil ait reçu des conseils juridiques de l’avocat du Canton ou discuté de tels conseils pendant cette partie de la réunion. Par conséquent, cette partie de la discussion n’entre pas dans l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e).

35    Après que l’avocat(e) du(de la) propriétaire a quitté la réunion, le Conseil a directement consulté l’avocat du Canton, et reçu des conseils à propos de la légalité de la transaction qu’il envisageait. Comme le Conseil a reçu des conseils juridiques, cette seconde partie de la séance entre dans l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e).

 

Exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds, alinéa 239(2)c)

36    Le Conseil a aussi invoqué l’exception relative à l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds pour sa séance à huis clos du 13 janvier 2023. Comme il a été dit plus haut, cette exception vise à protéger la position de négociation d’une municipalité en admettant la tenue à huis clos d’une discussion au sujet d’une acquisition ou disposition foncière projetée ou en cours[5].

37    En l’espèce, le Conseil a été informé par l’avocat(e) du(de la) propriétaire au sujet d’une possible transaction foncière, puis a discuté des détails de cette transaction et d’une autre transaction afférente. Ici, la divulgation publique de la discussion du Conseil aurait pu nuire à la position de négociation de la Municipalité pour ces deux transactions. Par conséquent, le Conseil avait une position de négociation à protéger, et l’ensemble de la discussion à huis clos entre dans l’exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds.

 

Vote

38    Rien n’indique que le Conseil aurait procédé à un vote à huis clos le 13 janvier 2023.

 

Réunion du Conseil du 7 février 2023

39    Le Conseil s’est de nouveau réuni le 7 février 2023. Après un certain temps en séance publique, il s’est retiré à huis clos pour discuter du tronçon ouest du chemin Otter Lake en invoquant l’exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds.

40    À huis clos, le Conseil a reçu et étudié une correspondance de l’avocat(e) du(de la) propriétaire du bien-fonds traversé par le tronçon ouest du chemin Otter Lake à propos d’une possible transaction foncière, puis a discuté des façons de mener cette éventuelle transaction.

41    Le Conseil a voté une résolution à huis clos en vue de donner à l’avocat du Canton des directives concernant cette transaction foncière. Le Conseil a repris sa séance publique et demandé à la greffière de fournir à l’avocat du Canton de l’information en vue de négociations avec le propriétaire du bien-fonds traversé par le tronçon ouest du chemin Otter Lake.

 

Analyse

Exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds, alinéa 239(2)c)

42    Le Conseil a invoqué l’exception relative à l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds pour discuter du tronçon ouest du chemin Otter Lake à huis clos le 7 février 2023. Cette exception admet les discussions à huis clos au sujet d’une acquisition ou disposition projetée ou en cours et protège la position de négociation d’une municipalité relativement à cette transaction[6].

43    Lors de cette réunion, le Conseil a discuté de l’entente qu’il proposerait dans une transaction foncière pour un terrain en particulier. Le Conseil protégeait donc une position de négociation en se retirant à huis clos, et sa discussion entrait dans l’exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds.

 

Vote

44    Comme il a été dit plus haut, le Conseil a le droit de voter à huis clos quand il s’agit d’une question qu’il doit ou peut discuter à huis clos et quand ce vote porte sur une question de procédure ou vise à donner des directives ou des instructions à des fonctionnaires, agent(e)s, employé(e)s ou mandataires de la Municipalité, ou à des personnes dont les services ont été retenus, à contrat ou non. En l’espèce, la discussion du Conseil s’est tenue à huis clos à bon droit, et le vote concernait des directives à donner à l’avocat(e) du Canton. Par conséquent, le Conseil avait le droit de tenir ce vote à huis clos le 7 février 2023.

 

Réunion du Conseil du 4 avril 2023

45    Le Conseil s’est réuni une nouvelle fois le 4 avril 2023. Après avoir discuté de différents points en séance publique, il a résolu de se retirer à huis clos pour discuter de deux autres points à l’ordre du jour : [Traduction] « Autorisation – Algie », en vertu de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e), et [Traduction] « Aménagement foncier – 10th Side Road », en vertu de l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée.

 

« Autorisation – Algie » concernant une demande de séparation

46    En séance à huis clos, le Conseil a d’abord discuté du point « Autorisation – Algie ». Il s’agissait d’une demande de séparation faite par quelqu’un du public souhaitant diviser son bien-fonds, et d’une condition contestée que la Municipalité voulait poser contre la possible acceptation de cette demande. L’avocat du Canton était absent de cette réunion.

47    Le Conseil s’est fait remettre une correspondance de l’avocat(e) de l’auteur(e) de la demande. Y étaient présentés l’historique du bien-fonds, une position relative à la condition exigée par la Municipalité, et des solutions proposées pour la suite des choses. Y était aussi détaillé un différend personnel concernant le bien-fonds, entre l’auteur(e) de la demande et un(e) autre membre du public.

48    Notre examen a révélé que le Conseil avait discuté de cette lettre et des façons de traiter la question, avec une attention particulière à une servitude proposée dont il était question dans la correspondance. Le Conseil n’a pris aucune décision à l’issue de cette discussion.

 

« Aménagement foncier – 10th Side Road »

49    Toujours à huis clos, le Conseil a ensuite traité le point « Aménagement foncier – 10th Side Road ». Cette question était en lien avec un secteur du territoire municipal se trouvant près d’une colline abrupte aux abords de la 10th Side Road, un tronçon de cette route ayant été acquis par le Canton il y a plusieurs décennies. Le Canton avait récemment eu connaissance d’une information qui aurait des répercussions sur le sentier utilisé par le public dans ce secteur. Le Conseil a discuté de ce qu’il convenait de faire pour la suite des choses.

50    Le maire a présenté un compte-rendu au Conseil au sujet de sa récente discussion avec le(la) propriétaire d’un bien-fonds adjacent. L’identité de ce(cette) propriétaire et le bien-fonds en question ont tous deux été divulgués. Après ce compte-rendu, le Conseil a discuté des possibles solutions, mais n’a pris aucune décision.

51    Après cette discussion, le Conseil a repris la séance publique et a demandé à la greffière d’organiser par la suite une téléconférence avec l’avocat du Canton. La réunion a alors été levée.

 

Analyse

Exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e), alinéa 239(2)f)

52    Le Conseil a invoqué l’exception relative aux conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e) pour discuter du point « Autorisation – Algie » à huis clos. Cette exception admet qu’une municipalité se retire à huis clos pour recevoir des conseils confidentiels protégés par le secret professionnel de l’avocat(e), pour les examiner ou pour en discuter[7].

53    Rien ne prouve ici que le Conseil ait reçu des conseils juridiques ou discuté de tels conseils lors de sa réunion à huis clos. L’avocat du Canton était absent, et aucune des personnes rencontrées en entrevue ne se souvenait de conseils juridiques ayant été discutés.

54    Par conséquent, la discussion à huis clos n’entre pas dans cette exception.

 

Exception en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds, alinéa 239(2)c)

55    Mon Bureau, bien que le Conseil n’ait pas invoqué cette exception, a aussi évalué la question de savoir si l’exception relative à l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds pouvait s’appliquer à la discussion tenue à huis clos au sujet du point « Autorisation – Algie » le 4 avril 2023.

56    Comme il a été dit plus haut, mon Bureau a conclu que cette exception s’appliquait quand un conseil débattait de la manière d’opérer la disposition d’un bien-fonds en particulier[8]. En l’espèce, le Conseil a discuté de la manière de traiter une possible transaction foncière dans le contexte d’un désaccord entre la municipalité et le(la) propriétaire. Le Conseil a discuté d’une éventuelle servitude et débattu au sujet de différentes propositions du(de la) propriétaire du bien-fonds. La discussion, si elle avait été divulguée publiquement, aurait donc pu avoir une incidence sur la position de négociation de la Municipalité dans la transaction.

57    Par conséquent, la discussion du Conseil au sujet du point « Autorisation – Algie » relevait de l’exception relative à l’acquisition ou la disposition d’un bien-fonds.

 

Exception relative aux renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée, alinéa 239(2)b)

58    Le Conseil a invoqué l’exception des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée pour discuter du point « Aménagement foncier – 10th Side Road » à huis clos.

59    Cette exception s’applique aux discussions dans le cadre desquelles sont révélés des renseignements privés concernant une personne identifiable. Pour que cette exception s’applique, il faut pouvoir croire, de façon raisonnable, que la personne concernée pourrait être identifiée si lesdits renseignements étaient révélés au public[9]. De plus, il doit s’agir de renseignements personnels, et non de renseignements professionnels, ni de renseignements donnés dans le cadre d’activités commerciales,[10] ni de renseignements liés à des activités à but lucratif[11].  

60    En l’espèce, le Conseil a discuté de la déclaration d’intérêt préliminaire d’un(e) propriétaire dans une transaction foncière indéterminée, transaction proposée par la Municipalité afin de résoudre un problème lié au bien-fonds. Il n’y avait pas d’attente que le(la) propriétaire tire profit de la transaction. L’information n’était pas liée à la personne en question à titre professionnel ou commercial, ni au titre d’activités lucratives; la volonté du(de la) propriétaire d’envisager la transaction constituait une information personnelle.

61    En outre, étant donné que la personne en question avait été nommée pendant la discussion, celle-ci pouvait être identifiée par le public.

62    Par conséquent, la discussion tenue à huis clos sur le point « Aménagement foncier – 10th Side Road » entrait dans l’exception invoquée.

 

Vote

63    En ce qui concerne la plainte alléguant que le Conseil aurait indûment tenu un vote à huis clos le 4 avril 2023, notre examen n’a pas permis de conclure s’il y a eu, oui ou non, tenue d’un vote en séance publique ou à huis clos. Le procès-verbal de la réunion publique indique qu’il a été demandé à la greffière d’organiser une téléconférence avec l’avocat du Canton, mais rien n’indique qu’il y a eu un vote au sujet de cette directive. Les personnes rencontrées par mon Bureau ne se souvenaient pas si un vote avait eu lieu ou non, ou si ce vote se serait déroulé en séance publique ou à huis clos.

64    Mon Bureau a jugé que le « consensus verbal » constitue un vote du Conseil au sens de la Loi[12]. Par conséquent, la directive donnée à la greffière en l’espèce peut être considérée comme étant un vote. Si ce vote s’est fait à huis clos, le Conseil avait le droit de procéder ainsi du fait qu’il s’était retiré à huis clos à bon droit et qu’il s’agissait d’une directive au personnel.

65    Néanmoins, à titre de pratique exemplaire pour l’avenir, le Conseil devrait clairement indiquer la directive donnée, tenir un vote formel à ce sujet, et consigner ce vote dans le procès-verbal de sa séance à huis clos.

 

Réunion du Conseil du 10 octobre 2023

66    Le Conseil a de nouveau tenu une réunion ordinaire le 10 octobre 2023. Cette réunion a commencé par une séance à huis clos, suivie d’une séance publique. On nous a dit que la réunion avait été structurée de la sorte pour les besoins de l’avocat du Canton, qui allait assister à la séance à huis clos.

67    Notre examen a permis de constater que la salle du Conseil était restée verrouillée du début de la réunion – y compris à l’ouverture de la réunion par le Conseil – jusqu’à la fin de la séance à huis clos. Nous avons aussi conclu que le Conseil n’avait jamais résolu de se retirer à huis clos.

68    Le Conseil a discuté de trois points à l’ordre du jour à huis clos en invoquant l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e) : [Traduction] « La colline de Ken Wards et la loi sur les chemins d’accès privé », [Traduction] « Taxes pour le chemin P Line – L’avocat préparera une lettre » et [Traduction] « Inscrire un addenda au code de conduite. L’avocat révisera les changements apportés au texte ».

69    Tout d’abord, le Conseil a tenu une discussion concernant le point « La colline de Ken Wards et la loi sur les chemins d’accès privé », soit la même question que celle discutée par le Conseil à sa réunion du 4 avril 2023 sous l’intitulé « Aménagement foncier – 10th Side Road ». Le Conseil a de nouveau discuté des problèmes liés au bien-fonds municipal dans ce secteur. Il s’est entretenu avec l’avocat du Canton au sujet de préoccupations en lien avec l’utilisation d’un sentier dans le secteur, et l’avocat a donné des conseils juridiques.

70    Ensuite, le Conseil a traité du point « Taxes pour le chemin P Line – L’avocat préparera une lettre ». Cette question concernait un(e) citoyen(ne) qui demandait une dispense de taxes foncières. Le Conseil a reçu des conseils juridiques à propos d’une possible dispense fiscale pour cette personne. Il a fini par demander à l’avocat du Canton de rédiger une lettre.

71    Enfin, il a été question de l’addenda au code de conduite. Le Conseil a consulté l’avocat du Canton quant à la légalité d’éventuelles modifications au code de conduite. Aucune décision n’a été prise ni aucune modification apportée.

 

Analyse

Exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e), alinéa 239(2)f)

72    Le Conseil a invoqué l’exception relative aux conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e) pour étudier trois questions à huis clos. Cette exception s’applique aux discussions où le Conseil reçoit ou examine des conseils confidentiels protégés par le secret professionnel de l’avocat(e)[13].

73    Lors de la réunion du 10 octobre 2023, le Conseil a directement consulté l’avocat du Canton, qui l’a conseillé au sujet de chacune des questions étudiées. Par conséquent, ces discussions à huis clos entrent dans l’exception invoquée.

 

Participation du public à la réunion du 10 octobre 2023

74    Une plainte alléguait que les membres du public n’avaient pas pu assister à la réunion du 10 octobre 2023 en personne parce que les portes de la salle du Conseil étaient verrouillées. Notre enquête a permis de constater que ces portes étaient verrouillées au début de la réunion du Conseil, y compris à l’ouverture de la séance, et le sont demeurées jusqu’à ce que le Conseil termine sa séance à huis clos et revienne en séance publique.

75    Le paragraphe 239(1) de la Loi dispose que toutes les réunions d’un conseil municipal doivent être ouvertes au public, sous réserve des exceptions prescrites. Mon Bureau a précédemment conclu que les réunions du Conseil dont certaines parties sont fermées au public du fait que les portes sont verrouillées contreviennent à ce paragraphe de la Loi[14].

76    En l’espèce, même si les portes de la salle n’ont été verrouillées que peu de temps juste avant que le Conseil se retire à huis clos, cette partie-là de la réunion du Conseil du 10 octobre 2023 a été indûment fermée au public, à l’encontre de la Loi.

77    Le maire a précisé à mon Bureau que le Conseil n’avait pas l’habitude de se retirer à huis clos au début d’une réunion, et que c’est à cause de cette formule que les portes ont été verrouillées par erreur. Le maire nous a dit qu’à l’avenir, le Conseil s’assurerait que cela ne se reproduise pas.

 

Résolution de se retirer à huis clos lors de la réunion du 10 octobre 2023

78    À sa réunion du 10 octobre 2023, le Conseil n’a pas voté ni adopté de résolution de retrait à huis clos.

79    L’alinéa 239(4)a) de la Loi prévoit qu’avant de tenir une réunion à huis clos, la Municipalité doit indiquer par voie de résolution le fait que la réunion doit se tenir à huis clos et la nature générale de la question devant y être étudiée. Mon Bureau a réitéré que la Loi exige que le Conseil adopte une résolution indiquant le fait que la réunion doit se tenir à huis clos et la nature générale de la question à étudier, et qu’il doit le faire avant de se retirer à huis clos[15].

80    En l’espèce, le Conseil n’a tenu aucun vote ni adopté de résolution en séance publique pour se retirer à huis clos le 10 octobre 2023, ce qui est contraire à l’alinéa 239(4)a) de la Loi.

 

Procès-verbal de la séance à huis clos de la réunion du 10 octobre 2023

81    Mon Bureau a appris lors de son enquête que le Conseil n’avait pas produit de procès-verbal pendant la partie à huis clos de sa réunion du 10 octobre 2023. Mon Bureau a été informé que c’était parce que le Canton se trouvait en transition, et que la tâche de rédiger les procès-verbaux avait été donnée à des membres du personnel récemment embauché(e)s peu après cette réunion.

82    Le paragraphe 239(7) de la Loi exige des municipalités qu’elles consignent, sans remarques, les résolutions, décisions et autres délibérations de leurs réunions. Cette obligation s’applique à toutes les réunions, publiques ou à huis clos.

83    Mon Bureau a déjà expliqué que « conserver des procès-verbaux complets et exacts des réunions à huis clos permet aux membres du public d’avoir l’assurance que les questions traitées en séance à huis clos se prêtaient à une discussion à huis clos et que les exigences de la Loi sur les municipalités et des règlements locaux ont été respectées[16] ».

84    En l’espèce, le Conseil n’a pas produit de procès-verbal pendant la séance à huis clos de sa réunion du 10 octobre 2023. Par conséquent, il a contrevenu au paragraphe 239(7) de la Loi.

 

Avis

85    Le Conseil du Canton de Jocelyn n’a pas contrevenu à la Loi de 2001 sur les municipalités en ce qui concerne sa réunion du 10 janvier 2023. Il avait le droit de discuter les questions des chemins P Line et Otter Lake en invoquant l’exception d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds.

86    Il n’a pas contrevenu à la Loi de 2001 sur les municipalités en ce qui concerne sa réunion du 13 janvier 2023. Il avait le droit de discuter les questions des chemins P Line et Otter Lake en invoquant l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e) et celle en cas d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds.

87    Il n’a pas contrevenu à la Loi de 2001 sur les municipalités en ce qui concerne sa réunion du 7 février 2023, car il lui était permis de discuter les questions concernant le tronçon ouest du chemin Otter Lake en vertu de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e).

88    Il n’a pas contrevenu à la Loi de 2001 sur les municipalités en ce qui concerne sa réunion du 4 avril 2023, car il avait le droit de discuter des points « Autorisation – Algie » et « Aménagement foncier – 10th Side Road » en vertu de l’exception d’acquisition ou de disposition d’un bien-fonds et de celle des renseignements privés concernant une personne qui peut être identifiée.

89    Le Conseil n’a pas tenu de votes illégaux lors de ces quatre réunions.

90    En revanche, il a contrevenu à la Loi de 2001 sur les municipalités lors de sa réunion du 10 octobre 2023 en fermant indûment le début de sa réunion au public, en omettant d’adopter une résolution de retrait à huis clos et en omettant de produire un procès-verbal de la séance à huis clos. Toutefois, la Loi autorisait le Conseil à tenir sa discussion à huis clos aux termes de l’exception des conseils protégés par le secret professionnel de l’avocat(e).

 

Recommandations

91    Je fais les recommandations suivantes afin d’aider le Canton de Jocelyn à s’acquitter des obligations qui lui incombent selon la Loi de 2001 sur les municipalités et à accroître la transparence de ses réunions :

 
Recommandation 1

Les membres du Conseil du Canton de Jocelyn devraient demeurer vigilant(e)s dans l’exercice de leur obligation individuelle et collective de s’assurer que la Municipalité remplit ses responsabilités prévues dans la Loi de 2001 sur les municipalités et son règlement procédural.

 
Recommandation 2

Le Conseil du Canton de Jocelyn devrait s’assurer que des comptes-rendus exacts et complets sont rédigés pour toutes les réunions, y compris celles à huis clos.

 
Recommandation 3

Le Conseil du Canton de Jocelyn devrait adopter une résolution en séance publique afin d’indiquer le fait qu’une séance à huis clos doit avoir lieu et la nature générale de la ou des questions devant y être étudiées, avant de se retirer à huis clos.

 
Recommandation 4

Le Conseil du Canton de Jocelyn devrait s’assurer que le public est en mesure d’accéder et d’assister à toutes les séances publiques du Conseil, y compris celles se tenant immédiatement avant une séance à huis clos.



 

Rapport

92    Le Conseil du Canton de Jocelyn a eu l’occasion d’examiner une version préliminaire du présent rapport et de le commenter à l’intention de mon Bureau. Nous n’avons reçu aucun commentaire.

93    Le présent rapport sera publié sur le site Web de mon Bureau et devrait aussi être rendu public par le Canton de Jocelyn. Conformément au paragraphe 239.2(12) de la Loi de 2001 sur les municipalités, le Conseil doit adopter une résolution indiquant comment il entend y donner suite.


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Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario



[1] L.O. 2001, chap. 25.
[2] Lettre de l’Ombudsman de l’Ontario au Canton de Ryerson (8 novembre 2013), en ligne; Lettre de l’Ombudsman de l’Ontario au Canton d’Adelaide-Metcalfe (23 mai 2012), en ligne.
[3] Lettre de l’Ombudsman de l’Ontario à la Ville d’Ajax (28 mars 2014), en ligne.
[4] Supra note 2.
[5] Supra note 3.
[6] Ibid.
[7] Supra note 2.
[8] Supra note 6.
[9] Ontario (Ministry of Correctional Services) v. Goodis [2008], OJ no 289, para 69.
[10] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur des réunions à huis clos tenues par la Ville d’Amherstburg le 8 août, le 13 septembre, le 8 novembre et le 16 novembre 2021, (juillet 2022), en ligne.
[11] Ombudsman de l'Ontario, Enquête visant à déterminer si les Conseils du Canton d’Armour et du Village de Burk’s Falls ont tenu des réunions à huis clos illégales le 16 janvier 2015, (octobre 2015), en ligne.
[12] Ombudsman de l'Ontario, Enquête à propos d’une plainte sur une réunion à huis clos tenue par la Ville de Plympton-Wyoming le 24 juin 2020, (février 2021), en ligne.
[13] Supra note 2.
[14] Lettre de l’Ombudsman de l’Ontario à la Ville de London (12 mai 2023), en ligne.
[15] Supra note 15.
[16] Ombudsman de l'Ontario, Enquête sur une plainte à propos d’une réunion tenue par le conseil du Canton de Tehkummah le 22 décembre 2017, (avril 2018), en ligne.